Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-OSA-009
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EEXPLICATION DES CIRCONSTANCES ENTOURANT LA PUBLICATION DE RAPPORTS DU DIRECTEUR SUR DES AGRESSIONS SEXUELLES
En vertu de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (UES), le directeur peut exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier un rapport du directeur portant sur une agression sexuelle qu’a subie une personne (ci-après dénommée le « plaignant »), lorsque les intérêts de la vie privée du plaignant à ne pas voir le rapport publié l’emportent clairement sur l’intérêt public à le faire, sous réserve d’une consultation préalable avec le plaignant.
Sans consentement du plaignant, l’UES a pour politique de ne pas publier le rapport du directeur, car elle craint que la diffusion de renseignements relatifs aux agressions sexuelles rapportées ne décourage davantage le signalement d’un crime déjà peu déclaré. De plus, une telle publication pourrait porter atteinte aux intérêts supérieurs des parties concernées en matière de vie privée, notamment ceux du plaignant.
Après avoir consulté le plaignant dans cette affaire, le directeur a décidé de publier le rapport, le plaignant ayant consenti à sa publication.
Contenus:
Mandat de l’UES
En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales
En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :- le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
- des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
- des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
- des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
- des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
- des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée
En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :- des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
- des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
- des renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé
En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.Exercice du mandat
Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.
De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.
L’enquête
Notification de l’UES
Le 4 janvier 2021, à 13 h 10, le Service de police de Barrie a communiqué avec l’UES a communiqué avec l’UES pour lui signaler la plainte pour agression sexuelle faite par le plaignant.Vers 5 h 5 le 12 septembre 2020, le Service de police de Barrie a signalé que le plaignant avait été arrêté en relation avec des voies de fait sur sa conjointe, soit le témoin civil (TC), à sa résidence de Barrie. À la suite de son arrestation, le plaignant a déposé une plainte auprès du Bureau du directeur indépendant de l'examen de la police alléguant que, pendant son interaction avec les agents, un des agents avait touché ses organes génitaux. Peu de détails avaient été fournis. Les agents en cause étaient l’agent impliqué (AI) et l’agent témoin (AT) no 1. Le Service de police de Barrie a obtenu la vidéo de la cellule pour la période où le plaignant était sous garde.
L’équipe
Date et heure de l’envoi de l’équipe : 6 janvier 2021, à 8 h 23Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 6 janvier 2021 à 11 h 35
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0
Personne concernée (« plaignant »)
Témoin civil
TC A participé à une entrevue le 12 février 2021Agent impliqué
AI A participé à une entrevue le 28 janvier 2021 et ses notes ont été reçues et examinéesAgents témoins
AT no 1 A participé à une entrevue le 15 janvier 2021 et ses notes ont été reçues et examinées
AT no 2 A participé à une entrevue le 18 janvier 2021 et ses notes ont été reçues et examinées
Éléments de preuve
Les lieux
Les lieux n’ont pas été préservés. Il s’agissait de l’intérieur d’une voiture de police hors de la résidence du plaignant, à Barrie.Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies
Sommaire des enregistrements de communications de la police du 12 septembre 2020
Les enregistrements ont été reçus du Service de police de Barrie le 20 janvier 2021.Le 12 septembre 2020, à 5 h 5, le TC a appelé le Service de police de Barrie et a signalé que son conjoint, soit le plaignant, lui avait serré la gorge.
À 5 h 7, l’AI et l’AT no 1 ont été envoyés à la résidence à la suite de l’appel et sont arrivés sur les lieux à 5 h 16. L’AT no 1 et l’AI ont arrêté le plaignant sans incident.
Les agents sont arrivés au poste de police à 5 h 58. Le plaignant a alors été enregistré et placé dans une cellule.
Sommaire de la vidéo de l’enregistrement du 12 septembre 2020
Les enregistrements vidéo ont été reçus du Service de police de Barrie le 1er février 2021.Le 12 septembre 2020, à 6 h 12, le plaignant a été conduit dans l’aire des cellules par deux agents en uniforme. Il a été menotté les mains derrière le dos et portait un pantalon foncé et était torse nu. Les caméras étaient éloignées et les voix n’étaient pas synchronisées avec le mouvement de la bouche des personnes présentes. Le son était aussi de piètre qualité et étouffé.
L’agent responsable [maintenant identifié comme l’AT no 2] n’était pas visible. Une série de questions standard ont été posées au plaignant et celui-ci a donné des détails sur ses problèmes de santé et les médicaments qu’il prenait. Il n’a aucunement fait mention d’une agression sexuelle. À 6 h 16, le plaignant s’est placé devant un comptoir et a été fouillé. Il a ensuite été escorté et est sorti du champ de la caméra.
Documents obtenus du service de police
L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a remis le Service de police de Barrie entre le 14 janvier 2021 et le 1er février 2021 :- le rapport d’arrestation;
- l’enregistrement vidéo de la salle d’enregistrement;
- les enregistrements de communications;
- le rapport du système de répartition assisté par ordinateur;
- les documents du système de gestion des documents;
- la liste des faits;
- la procédure relative aux arrestations par la police;
- la procédure relative à violence familiale;
- la procédure relative à l’usage de la force par la police;
- le registre de formation de l’AI;
- la liste des agents concernés;
- les notes de l’AI;
- les notes de l’AT no 2.
- les notes de l’AT no 1;
- la plainte déposée auprès du Bureau du directeur indépendant de l’examen de la police par le plaignant.
Description de l’incident
Le plaignant a été arrêté et menotté par les agents dans sa résidence, puis a été escorté jusqu’à la voiture de police de l’AT no 1. Une fois au poste, le plaignant a été placé dans une cellule. Il a par la suite été confié à la garde du Centre correctionnel du Centre-Nord, à partir duquel il a par la suite déposé une plainte auprès du Bureau du directeur indépendant de l'examen de la police.
Le plaignant a affirmé que l’AI lui avait attrapé les testicules pendant qu’il l’installait sur la banquette arrière de la voiture de police.
L’AI a catégoriquement nié avoir touché aux organes génitaux du plaignant à quelque moment que ce soit et il n’a pas vu non plus l’AT no 1 le toucher de manière répréhensible. La version de l’AT no 1 est identique à celle de son partenaire.
Dispositions législatives pertinentes
Paragraphe 265(2) du Code criminel -- Voies de fait
265 (1) Commet des voies de fait, ou se livre à une attaque ou une agression, quiconque, selon le cas :
a) d’une manière intentionnelle, emploie la force, directement ou indirectement, contre une autre personne sans son consentement;
b) tente ou menace, par un acte ou un geste, d’employer la force contre une autre personne, s’il est en mesure actuelle, ou s’il porte cette personne à croire, pour des motifs raisonnables, qu’il est alors en mesure actuelle d’accomplir son dessein;
c) en portant ostensiblement une arme ou une imitation, aborde ou importune une autre personne ou mendie.
(2) Le présent article s’applique à toutes les espèces de voies de fait, y compris les agressions sexuelles, les agressions sexuelles armées, menaces à une tierce personne ou infliction de lésions corporelles et les agressions sexuelles graves.
(3) Pour l’application du présent article, ne constitue pas un consentement le fait pour le plaignant de se soumettre ou de ne pas résister en raison :
a) soit de l’emploi de la force envers le plaignant ou une autre personne;
b) soit des menaces d’emploi de la force ou de la crainte de cet emploi envers le plaignant ou une autre personne;
c) soit de la fraude;
d) soit de l’exercice de l’autorité.
Article 271 du Code criminel -- Agression sexuelle
271 Quiconque commet une agression sexuelle est coupable :a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans ou, si le plaignant est âgé de moins de seize ans, d’un emprisonnement maximal de quatorze ans, la peine minimale étant de un an;
b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et passible d’un emprisonnement maximal de dix-huit mois ou, si le plaignant est âgé de moins de seize ans, d’un emprisonnement maximal de deux ans moins un jour, la peine minimale étant de six mois.
Analyse et décision du directeur
Une agression sexuelle s’entend d’une agression conforme à la définition donnée par le Code criminel qui est de nature sexuelle et viole l’intégrité sexuelle de la victime, conformément à R. c. Chase, [1987] 2 RCS 293.
Même si, dans l’éventualité où elle serait vraie, la version des faits du plaignant pourrait signifier qu’il y a vraiment eu une agression sexuelle, je considère qu’il serait mal avisé et dangereux de déposer des accusations en se fondant uniquement sur cet élément de preuve. En termes simples, les souvenirs du plaignant par rapport à divers aspects de l’incident n’étaient corroborés par rien d’autre et ils entraient même en contradiction d’une manière importante avec le reste des éléments de preuve. À la lumière de la fragilité des éléments de preuve émanant du plaignant, je considère que ses déclarations ne sont pas assez fiables pour être soumises à un juge des faits.
Les autres éléments de preuve portent à croire que le plaignant a été arrêté et mis sous garde par la police sans incident.
En définitive, puisqu’il m’est impossible de conclure, d’après ce qui précède, que l’AI a fait des attouchements au plaignant, il n’y a pas lieu de porter des accusations dans cette affaire et le dossier est clos.
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.