Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-OCD-183

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :
  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
  • le nom de tout agent impliqué;
  • le nom de tout agent témoin;
  • le nom de tout témoin civil;
  • les renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables. 

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).

On doit englober dans les « blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur le décès de M. Alberto Ayala-Guerrero.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 25 juillet 2020, à 12 h 12, le Service de police de Brockville (SPB) a contacté l’UES et donné le rapport qui suit.

Le 25 juillet 2020, à 10 h 19, des agents du SPB étaient en patrouille mobile lorsqu’ils ont repéré un homme recherché sur le pont de North Augusta Road qui enjambe l’autoroute 401. Ils ont fait demi-tour et ont roulé jusqu’à l’homme [maintenant connu pour être M. Ayala-Guerrero].

Quand les agents se sont approchés de lui pour l’arrêter, M. Ayala-Guerrero s’est éloigné, a enjambé le garde-corps et a atterri sur la bretelle d’accès de l’autoroute 401 ouest. M. Ayala-Guerrero était toujours en vie. Les services médicaux d’urgence (SMU) l’avaient transporté à l’Hôpital général de Brockville (HGB), d’où on l’avait transféré à l’Hôpital général de Kingston (KGH) dans un état grave.

À 13 h 47, la police a avisé l’UES que M. Ayala-Guerrero avait succombé à ses blessures.

M. Ayala-Guerrero était de Houston, au Texas, où il était recherché pour meurtre.

Il était dans la région de Brockville depuis au moins le jeudi précédent, essayant de trouver un hôtel qui accepterait un paiement en espèces. 
 

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

À la suite d’un appel à témoins, d’une recherche dans le secteur et de renseignements communiqués par le SPB, des témoins civils ont été identifiés et interrogés. Les enquêteurs de l’UES ont également fait le tour du secteur à la recherche de caméras de surveillance, mais n’en ont pas trouvé.

Un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires a examiné les lieux et pris des photos.

Plaignante :

Homme de 56 ans, décédé


Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue
TC no 4 A participé à une entrevue
TC no 5 A participé à une entrevue
TC no 6 A participé à une entrevue
TC no 7 A participé à une entrevue 

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées
AT no 2 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

En outre, l’UES a reçu et examiné les notes de quatre autres agents.


Agents impliqués (AI)

AI no 1 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées
AI no 2 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées



Éléments de preuve

Les lieux

L’incident s’est produit sur le pont de North Augusta Road qui enjambe l’autoroute 401, à Brockville. Le pont a des trottoirs de chaque côté, protégés par des garde-corps en béton et en métal. La distance depuis le haut du garde-corps est de 1,1 mètre jusqu’au trottoir et de de 8,7 mètres jusqu’à la chaussée en dessous. La zone d’impact était à 2,02 mètres au sud du mur droit nord et à 2,52 mètres au sud du mur incurvé.

North Augusta Road est une route goudronnée à quatre voies nord-sud, qui passe par-dessus l’autoroute 401. Après sa chute, M. Ayala-Guerrero a été retrouvé à l’endroit où la bretelle d’accès rejoint l’autoroute en direction ouest. Il y avait à cet endroit une tache de sang sur l’asphalte ainsi qu’une chaussure de sport noire et trois inhalateurs médicaux.



Figure 1 - Lieu de l’incident sur l’autoroute 401 au pont de North Augusta Road

Enregistrements des communications de la police

9 h 55 min 13 s – 9 h 55 min 24 s : L’AI no 2 dit par radio au répartiteur du SPB qu’avec l’AI no 1, ils vont poursuivre M. Ayala-Guerrero sur le pont de North Augusta et de la 401. M. Ayala-Guerrero court, et les agents pensent que c’est l’homme signalé la veille pour meurtre.

9 h 55 min 41 s – 9 h 56 min 3 s : L’AI no 2 dit que M. Ayala-Guerrero vient de sauter du pont et qu’il git sur la rampe d’accès. L’AI no 1 demande au répartiteur d’envoyer les SMU.

9 h 56 min 17 s – 9 h 56 min 51 s : L’AI no 2 dit au répartiteur qu’ils vont avoir besoin des SMU parce que M. Ayala-Guerrero s’est cogné la tête. Il ajoute que c’est sur la bretelle d’accès de North Augusta à l’autoroute 401 en direction ouest. M. Ayala-Guerrero respire encore.

9 h 59 min 39 s – 9 h 59 min 43 s : L’AI no 2 demande au répartiteur l’heure d’arrivée prévue des SMU. Le répartiteur répond qu’ils sont en route.

10 h 00 min 15 s – 10 h 00 min 22 s : L’AT no 1 demande à l’AT no 2 s’il veut qu’il bloque la bretelle d’accès. L’AT no 2 dit à l’AT no 1 que s’il est là, ce serait utile et l’AT no 1 lui répond qu’il se charge immédiatement de bloque la circulation.

10 h 00 min 47 s : Le répartiteur du SPB dit à l’AT no 2 que les SMU sont en route depuis leur poste du nord, juste au nord de la 401, et devraient être là dans quelques minutes. L’AT no 2 accuse réception.

10 h 07 min 37 s – 10 h 08 min 44 s : L’AT no 2 dit au répartiteur que l’ambulance arrive, mais se dirige dans le mauvais sens, en direction est. Il demande au répartiteur de vérifier si l’ambulance qui vient de passer devant eux dans la mauvaise direction est pour eux ou non. Le répartiteur dit à l’AT no 2 que c’est bien l’ambulance envoyée pour eux et qu’elle fait demi-tour.

10 h 25 min 50 s : L’AI no 2 dit au répartiteur que M. Ayala-Guerrero a été placé dans l’ambulance, que l’AI no 1 est dans l’ambulance avec les ambulanciers et qu’ils sont sur le point de partir.

Enregistrements des communications des SMU

9 h 58 min 50 s – 9 h 59 min 32 s : Un répartiteur de la Police provinciale de l’Ontario appelle le répartiteur des services paramédicaux pour lui demander s’ils ont reçu un appel pour quelqu’un qui a sauté du pont de North Augusta Road, à la borne 698 sur l’autoroute 401. Le répartiteur de la Police provinciale dit que des agents de la Police provinciale et du SPB sont en route. Une ambulance est envoyée sur les lieux.

9 h 59 min 58 s – 10 h 06 min 0 s : Le répartiteur du SPB appelle le répartiteur des SMU et dit que l’homme vient de sauter et qu’il respire. Les agents demandent l’heure d’arrivée prévue de l’ambulance. Le répartiteur des SMU donne une mise à jour à l’équipe de l’ambulance qui est en route vers l’appel. Le répartiteur de la Police provinciale appelle et demande l’heure d’arrivée prévue de l’ambulance. Le répartiteur des SMU dit que l’ambulance devrait être sur place dans quelques minutes.

10 h 08 min 18 s : Le répartiteur du SPB appelle le répartiteur des SMU et lui dit que l’ambulance vient de passer devant la scène de l’incident en direction est alors que le blessé est dans les voies en direction ouest. Le répartiteur des SMU répond qu’on leur a initialement dit qu’il s’agissait des voies en direction est et que l’ambulance est en train de faire demi-tour.

10 h 11 min 56 s – 10 h 18 min 42 s : L’ambulance arrive sur le lieu de l’incident dans les voies en direction ouest de l’autoroute 401, sous le pont de North Augusta Road. Le répartiteur des SMU appelle l’Hôpital général de Brockville pour l’informer que les ambulanciers vont amener un patient qui a sauté du pont et que l’équipe de l’ambulance se met bientôt en route.

10 h 26 min 37 s – 10 h 27 min : Les ambulanciers sur place disent au répartiteur qu’ils quittent les lieux, en route vers l’hôpital. Ils transportent un homme de 55 ans qui a sauté du pont de l’autoroute 401 et a atterri sur son côté gauche. Son pouls est d’environ 150, ils commencent les ventilations et sont à environ une minute de l’hôpital.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande au SPB, l’UES a obtenu les documents et éléments suivants qu’elle a examinés :
  • Mandat d’arrêt – M. Ayala-Guerrero (Texas);
  • Enregistrements des communications;
  • Étiquettes d’identification de propriété du SPB;
  • Photos des lieux prises par le SPB;
  • Cartes de crédit et autres cartes de membre - M. Ayala-Guerrero;
  • Rapports du Centre d’information de la police canadienne (x3);
  • Liste de pièces justificatives;
  • Rapports généraux (x2);
  • Notes de l’agent no 1;
  • Notes de l’agent no 2;
  • Notes de l’AT no 2;
  • Notes de l’agent no 3;
  • Notes de l’AT no 1;
  • Notes de l’AI no 2;
  • Notes de l’agent no 4;
  • Notes de l’AI no 1;
  • Rapport de synthèse des événements;
  • Photo du permis de conduire – M. Ayala Guerrero;
  • Photo de la carte de sécurité sociale - M. Ayala-Guerrero;
  • Dossier photographique – Hôpital général de Brockville;
  • Dossier photographique – Photos de recherche de véhicules à moteur (x2);
  • Dossier photographique – Photos du pont de l’autoroute 401 prises par les services des sciences judiciaires;
  • Dossier photographique – Contenu du portefeuille;
  • Dossier photographique – Photos de recherche secondaire (x2);
  • Rapport sur les preuves matérielles;
  • Photos de fouille;
  • Rapports supplémentaires (x5);
  • Sommaire de la déclaration de l’agent no 4;
  • Sommaire de la déclaration de l’AT no 2 (x 2);
  • Sommaire de la déclaration de l’agent no 5;
  • Sommaire de la déclaration de l’AT no 1 (x 2);
  • Sommaire de la déclaration de l’AT no 2 (x 2);
  • Sommaire de la déclaration de l’agent no 6;
  • Sommaire de la déclaration de l’agent no 1;
  • Déclaration de témoin – TC no 1;
  • Alerte – 24 juillet 2020; et
  • Alerte – 24 juillet 2020 – Mise à jour.

Éléments obtenus auprès d’autres sources :

L’UES a examiné les dossiers suivants obtenus auprès de sources autres que la police :
  • Rapports d’appel d’ambulance;
  • Rapport détaillé des appels et enregistrements des communications des SMU;
  • Courriel au MTO concernant la caméra de circulation;
  • Photos prises par le TC no 2.

Description de l’incident

Les événements importants en question ressortent clairement des éléments de preuve recueillis par l’UES et peuvent être résumés comme suit : dans la matinée du 25 juillet 2020, M. Ayala-Guerrero était un homme recherché. Il s’était récemment enfui des États-Unis où un mandat d’arrêt avait été lancé contre lui dans l’État du Texas en lien avec le meurtre d’une femme le 13 juillet 2020. Le 24 juillet 2020, se plaignant d’essoufflement, M. Ayala-Guerrero s’était rendu à l’hôpital de Brockville où il avait fourni un faux nom et avait été traité avec un inhalateur. L’hôpital avait demandé à la police de venir s’occuper de M. Ayala-Guerrero, car il ne parlait pas bien anglais et n’avait aucune pièce d’identité. M. Ayala-Guerrero étant parti avant leur arrivée et soucieux de son bien-être, les agents du SPB ont retrouvé le taxi dans lequel il s’était rendu à l’hôpital. Après une enquête plus approfondie, ils sont parvenus à localiser un véhicule avec une plaque d’immatriculation du Texas et, finalement, ont été mis au courant du mandat américain. Avec cette information, l’Agence des services frontaliers du Canada a également lancé un mandat contre M. Ayala-Guerrero.

Pensant que M. Ayala-Guerrero était peut-être encore à Brockville, des agents du SPB, dont l’AI no 1 et l’AI no 2, se sont lancés à sa recherche. Ils étaient au courant des événements de la veille et avaient une photographie de M. Ayala-Guerrero – une photo prise par une caméra de sécurité de l’hôpital. L’AI no 1 était au volant d’un VUS aux couleurs du SPB et l’AI no 2 était son passager. Ils roulaient vers le nord sur North Augusta Road, à l’approche du pont sur l’autoroute 401, lorsqu’ils ont repéré un homme qui marchait vers le nord sur le trottoir ouest. Cet homme a attiré leur attention, car il portait un chandail avec la capuche sur la tête alors qu’il faisait chaud et humide. Les agents ont décidé de jeter un coup d’œil de plus près, ont dépassé l’homme, puis ont fait demi-tour au nord du pont et sont retournés vers le pont au sud. L’homme marchait toujours vers le nord sur le trottoir ouest et les agents ont pu voir son visage. Poursuivant leur route vers le sud, les agents se sont arrêtés momentanément dans une rue latérale pour examiner la photo de M. Ayala-Guerrero, qu’ils ont reconnu comme étant l’homme qu’ils venaient de voir.

L’AI no 1 et l’AI no 2 sont retournés sur North Augusta Road avec l’intention d’appréhender M. Ayala-Guerrero. Ils ont de nouveau dépassé M. Ayala-Guerrero et ont fait un autre demi-tour dans le secteur de l’avenue Parkdale Est avant de retourner vers le sud en direction de M. Ayala-Guerrero.

M. Ayala-Guerrero s’est alors rendu compte que les agents le poursuivaient. Il a fait demi-tour et s’est dirigé vers le pont, au sud, d’abord en marchant, puis en courant, sur le trottoir ouest. L’AI no 1 a accéléré pour le dépasser et a immobilisé son véhicule de police près de M. Ayala-Guerrero. L’AI no 2 est sorti en premier du véhicule. Il n’était plus qu’à quelques mètres de M. Ayala-Guerrero quand ce dernier a escaladé le garde-corps du pont. L’AI no 2 lui a crié de ne pas sauter et a couru pour l’agripper. L’agent a touché les vêtements au-dessus de l’épaule gauche et du bras de M. Ayala-Guerrero quand ce dernier à sauter du pont sur l’autoroute en contrebas.

M. Ayala-Guerrero a atterri sur la chaussée, à l’endroit où la bretelle d’accès rejoint l’autoroute en direction ouest, à North Augusta Road, et a été grièvement blessé. L’AI no 2 a immédiatement dévalé le remblai de North Augusta Road jusqu’à l’autoroute pour lui prêter assistance. L’agent l’a tiré hors de la voie de circulation jusqu’à l’accotement de gravier et l’a réconforté, en lui disant de respirer.

Les ambulanciers paramédicaux sont arrivés sur les lieux et se sont chargés des soins du blessé. M. Ayala-Guerrero a été emmené à l’Hôpital général de Brantford et, de là, à l’Hôpital général de Hamilton, où il est décédé.

Cause du décès


Dans son rapport sur les conclusions préliminaires de l’autopsie, le pathologiste a attribué la mort de M. Ayala-Guerrero à « de multiples blessures contondantes ».

Dispositions législatives pertinentes

Articles 219 et 220, Code criminel – Négligence criminelle causant la mort

219 (1) Est coupable de négligence criminelle quiconque :

a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qu’il est de son devoir d’accomplir,

montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.

(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

220 Quiconque, par négligence criminelle, cause la mort d’une autre personne est coupable d’un acte criminel passible :

a) s’il y a usage d’une arme à feu lors de la perpétration de l’infraction, de l’emprisonnement à perpétuité, la peine minimale étant de quatre ans; 
b) dans les autres cas, de l’emprisonnement à perpétuité.

Analyse et décision du directeur

Le 25 juillet 2020, Alberto Ayala-Guerrero est décédé des suites de blessures subies à la suite d’une chute d’un pont à Brockville. Comme des agents du SPB étaient présents et avaient tenté de placer M. Ayala-Guerrero sous garde au moment de sa chute, l’UES a été avisée et a ouvert une enquête. L’AI no 1 et l’AI no 2 ont été désignés agents impliqués aux fins de l’enquête de l’UES. Après avoir évalué les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’un ou l’autre de ces agents ait commis une infraction criminelle en lien avec le décès de M. Ayala-Guerrero.

L’infraction à prendre en considération en l’espèce est la négligence criminelle causant la mort, une infraction visée par l’article 220 du Code criminel. La culpabilité serait fondée, en partie, sur la conclusion que la conduite constituait un écart marqué et important par rapport à la norme de diligence qu’une personne raisonnable aurait exercée dans les circonstances. En l’espèce, il s’agit de déterminer si les agents ont fait preuve d’un manque de diligence qui a causé la mort de M. Ayala-Guerrero, ou y a contribué, et si ce manque était suffisamment flagrant pour entraîner une sanction pénale. À mon avis, ce n’est pas le cas.

L’AI no 2 et l’AI no 1 exerçaient légalement leurs fonctions lorsqu’ils ont repéré M. Ayala-Guerrero et ont décidé de tenter de l’arrêter. Ils savaient que M. Ayala-Guerrero était le suspect d’un meurtre commis récemment au Texas, pour lequel un mandat d’arrêt avait été lancé contre lui, et qu’il se trouvait dans la région de Brockville. Ils savaient également qu’un mandat d’arrêt à l’échelle du pays avait été lancé par l’Agence des services frontaliers du Canada. Dans les circonstances, lorsqu’ils ont repéré M. Ayala-Guerrero sur le pont de North Augusta Road, les agents étaient en droit de tenter de le placer en détention.

Par la suite, je ne trouve rien à redire à la manière dont ils ont abordé M. Ayala-Guerrero. Ils ne pouvaient pas savoir que M. Ayala-Guerrero, confronté à son appréhension imminente, agirait de façon aussi radicale. Quelques secondes après que l’AI no 2 est sorti du véhicule de police, lorsqu’il est devenu évident que M. Ayala-Guerrero escaladait la balustrade du pont, l’agent a fait son possible pour tenter de le sauver. Il a crié à M. Ayala-Guerrero d’arrêter et a essayé de le saisir pour l’empêcher de tomber. L’AI no 2 l’avait à peine touché quand M. Ayala-Guerrero a sauté du pont. Après la chute, l’AI no 2 s’est rapidement rendu aux côtés de M. Ayala-Guerrero et l’a tiré sur l’accotement de l’autoroute pour éviter toute autre blessure. Malheureusement, le mal était fait. D’après ce dossier, je suis convaincu que l’AI no 2 et l’AI no 1 – ce dernier étant en train de sortir de son véhicule lorsque M. Ayala-Guerrero est tombé – se sont comportés avec la diligence et le respect requis pour la santé et la sécurité de M. Ayala-Guerrero.

En conséquence, étant donné que je suis convaincu que l’AI no 2 et l’AI no 1 ont agi légalement à l’égard de M. Ayala-Guerrero, il n’y a aucun fondement pour des accusations criminelles dans cette affaire et le dossier est clos.

Date : 16 février 2021
Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéci

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.