Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 16-OCI-241

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu une allégation d’agression sexuelle.

Les « blessures graves » englobent celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, a priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant que la gravité de la blessure puisse être évaluée, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider de l’envergure de son intervention.

Ce rapport a trait à l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 53 ans, découverte le lendemain de son arrestation le 10 septembre 2016.

L’enquête

Notification de l’UES

L’UES a été informée de l’incident par le Service de police régional de Niagara (SPRN) le 19 septembre 2016 à 14 h 25.

Le SPRN a déclaré que le 10 septembre 2016, à environ 6 h, des agents du SPRN se sont rendus à une maison à St. Catharines pour intervenir dans un conflit familial. Pendant son arrestation, le plaignant s’est plaint d’une blessure au poignet qu’il avait subie plusieurs mois auparavant. Le plaignant a été transporté à l’hôpital où l’on a déterminé qu’il n’avait pas subi de nouvelles fractures. Le plaignant a ensuite été remis entre les mains de la police. Plus tard, le plaignant s’est plaint aux SPRN qu’il avait subi des fractures aux côtes et des lésions aux nerfs du poignet à cause de son arrestation.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4

Plaignant :

Entretien avec l’homme âgé de 53 ans, obtention et examen des dossiers médicaux

Remarque : Un plaignant est une personne qui, à la suite d’une interaction avec la police, a subi une blessure grave, est décédée ou allègue avoir été victime d’une agression sexuelle.

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

TC no 3 A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT A participé à une entrevue

Agents impliqués (AI)

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué

Enregistrements des communications

Résumé de l’enregistrement des communications au numéro 9-1-1

  • Le 10 septembre 2016, à 6 h 05, le TC no 1 a appelé le numéro 9-1-1 et a signalé que le plaignant se trouvait à l’extérieur de la maison où elle habite à St. Catharines
  • Le TC no 1 a décrit le plaignant comme étant ivre et gelé après avoir pris [traduction] « quelque chose », et qu’il criait et hurlait
  • Le TC no 1 a indiqué que le plaignant ne vivait pas avec elle et qu’il habitait à Niagara Falls
  • Le TC no 1 ne savait pas pourquoi le plaignant était chez elle. Elle a tenté de raisonner avec lui et lui a demandé de partir, mais le plaignant refusait de quitter
  • Le TC no 1 a indiqué que le plaignant avait téléphoné la maison de ses parents la semaine d’avant, mais qu’ils lui avaient raccroché au nez; et
  • La répartitrice a informé le TC no 1 que des agents de police viendraient chez elle

Documents obtenus du service de police

Sur demande, l’UES a obtenu les documents suivants du SPRN et les a examinés :

  • photographie de mise en détention – plaignant
  • vidéo de mise en détention
  • appel - Système de répartition assistée par ordinateur
  • communications – registre principal des enregistrements
  • registres de divulgation
  • tableau de service
  • formulaire de transfèrement médical du détenu
  • notes de l’AT
  • sommaire de la poursuite; et
  • dossier d’arrestation – plaignant

Description de l’incident

Le 10 septembre 2016, à environ 6 h, le plaignant s’est présenté à la résidence du TC no 1 pour lui parler. Le plaignant est l’ex-mari du TC no 1. Le plaignant criait et était intoxiqué à l’époque. Le TC no 1 a demandé au plaignant de partir, mais il a refusé. Le TC no 1 a communiqué avec la police.

L’AI et l’AT ont été envoyés à la résidence du TC no 1, où ils sont arrivés vers 6 h 15. Ils ont constaté que le plaignant se trouvait de l’autre côté de la rue de la résidence. Les deux agents ont tenté de discuter avec le plaignant, mais il était agressif, belligérant et bruyant. Les agents ont constaté que l’haleine du plaignant sentait l’alcool.

Le plaignant a tenté de retourner à la propriété du TC no 1. Il a continué à crier. L’AI a décidé d’arrêter le plaignant parce qu’il troublait la paix. L’AI a menotté le plaignant avec ses mains derrière le dos. Le plaignant s’est plaint que son poignet était cassé, et puis s’est soudainement affaissé au sol, en criant qu’il avait une hanche fracturée. Le plaignant s’est retourné et a commencé à donner des coups de pied à l’AT, le frappant au tibia. L’AI a frappé le côté gauche du visage du plaignant une seule fois pour l’empêcher de continuer à agresser l’AT. Le plaignant a été maîtrisé et placé à l’arrière de la voiture de patrouille.

Une fois qu’il avait pris place dans la voiture de patrouille, le plaignant a continué d’être agité et a commencé à donner des coups de pied à la lunette arrière du véhicule et à se cogner la tête contre la cage métallique à l’intérieur. En raison de la déclaration du plaignant selon laquelle il avait un poignet et une hanche fracturés, les agents ont transporté le plaignant à l’hôpital, où il a continué d’être combatif. On l’a maîtrisé à l’hôpital, et il a subi un examen.

Les résultats de l’examen ont confirmé qu’il n’avait subi aucune nouvelle fracture à son poignet ni à son bassin. Le plaignant a été libéré de la garde policière le 11 septembre 2016.

Le 11 septembre 2016, le plaignant s’est rendu à un autre hôpital se plaignant de douleurs thoraciques et d’un poignet droit endolori. À cet hôpital, on a posé un diagnostic selon lequel le plaignant avait des fractures légèrement déplacées aux 5e et 6e côtes.

Lois pertinentes

Paragraphe 25(1), Code criminel - Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

  1. soit à titre de particulier
  2. soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
  3. soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
  4. soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Paragraphe 31(4), Loi sur les permis d’alcool – Ivresse

(4) Nul ne doit être en état d’ivresse :

  1. dans un lieu où le public accède sur invitation ou permission

Paragraphe 31(5), Loi sur les permis d’alcool - Arrestation sans mandat

(5) Un agent de police peut, sans mandat, procéder à l’arrestation de la personne qu’il trouve en contravention au paragraphe (4) si, à son avis, la protection de quiconque exige cette mesure.

Alinéa 175(1)a), Code criminel - Troubler la paix, etc

175 (1) Est coupable d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire quiconque, selon le cas :

  1. n’étant pas dans une maison d’habitation, fait du tapage dans un endroit public ou près d’un tel endroit :
    1. soit en se battant, en criant, vociférant, jurant, chantant ou employant un langage insultant ou obscène
    2. soit en étant ivre
    3. soit en gênant ou molestant d’autres personnes &hellip

Analyse et décision du directeur

Le 10 septembre 2016, à 6 h 05, la préposée aux appels au SPRN a reçu un appel du TC no 1, qui a indiqué que le plaignant était à l’extérieur de sa résidence et qu’il était sous l’influence de drogues et/ou d’alcool. Le TC no 1 a indiqué qu’elle avait demandé au plaignant de quitter la propriété, mais qu’il avait refusé. Par conséquent, l’AI et l’AT ont été envoyés à la résidence du TC no 1 dans la ville de St. Catharines. Après une certaine interaction avec les agents de police, le plaignant a été arrêté pour avoir troublé la paix dans un endroit public contrairement à l’al. 175(1)a) du Code criminel. Après son arrestation, le plaignant s’est plaint qu’il avait un poignet et une hanche fracturés, et il a été transporté à l’hôpital où des radiographies ont été prises de la tête, du bassin et du poignet du plaignant et où il a été déterminé que le plaignant n’avait subi aucune fracture. Le 11 septembre 2016, le plaignant s’est rendu un autre hôpital pour se plaindre qu’un agent de police avait placé un genou contre ses côtes du côté droit de son corps; les radiographies ont révélé des fractures légèrement déplacées aux cinquième et sixième côtes.

Le plaignant est retourné à l’hôpital le 20 septembre, où l’on a de nouveau pris une radiographie de son poignet droit, et les résultats ont révélé qu’il avait des fractures chroniques au radius distal, au cubitus et au quatrième métacarpien (quatrième doigt et poignet).

Dans sa déclaration, le plaignant a fait état de trois plaintes :

  1. L’AI l’a jeté au sol
  2. L’AI lui a mis des menottes trop serrées; et
  3. Le troisième agent lui a donné un coup de pied dans les côtes du côté droit

Le plaignant ne s’est pas plaint d’avoir été frappé au visage par l’un ou l’autre des agents présents.

Au cours de cette enquête, on s’est entretenu avec trois témoins civils en plus du plaignant, ainsi qu’avec les deux agents qui se sont rendus sur les lieux et qui ont participé à l’arrestation du plaignant. Les enquêteurs avaient également accès aux enregistrements des communications et au registre, aux notes entrées dans le calepin de l’AI et au tableau de service du 10 septembre 2016.

L’enregistrement de l’appel au numéro 9-1-1 a révèle que le TC no 1 a communiqué avec le SPRN à 6 h 05 et a indiqué que le plaignant était [traduction] « complètement gelé et ivre après avoir consommé quelque chose » et qu’il se trouvait devant sa résidence. Elle a ajouté [traduction] qu’« il est dehors en train de hurler et de crier » et qu’il était là pour [traduction] « la harceler », ainsi que ses parents. Elle a indiqué qu’il [traduction] « vient tout juste de réveiller tout le ménage » et qu’elle avait essayé de raisonner avec lui et lui avait dit de partir, mais qu’il refusait.

Le registre des communications révèle qu’à 6 h 14, une voiture de patrouille a été envoyée à la résidence avec l’AI et l’AT à bord. Le registre indique en outre que les deux agents sont arrivés sur les lieux à 6 h 15. Le tableau de service confirme que le véhicule de patrouille était occupé par l’AI et l’AT. Aucun autre agent n’a été dépêché ou ne s’est rendu aux lieux de l’incident.

La communication qui suit dans l’enregistrement venait de la voiture de patrouille de l’AI à 6 h 21, pour signaler que le plaignant avait besoin d’une ambulance en raison de son poignet; on entend le plaignant crier très fort en arrière-plan; pas de mots, seulement des cris. À 6 h 23, il y a de nouveau une communication de la voiture de patrouille et l’agent dit [traduction] « il vient de me frapper au […] » Il est impossible d’entendre le dernier mot sur le ruban et la préposée informe l’agent qu’elle ne peut l’entendre en raison des cris et il répète qu’[traduction] « il vient de me frapper au […] », mais encore une fois, les cris font qu’il est impossible d’entendre le dernier mot. La prochaine communication vient de la voiture de patrouille à 6 h 28, signalant que le plaignant [traduction] « donne maintenant des coups de pied dans les portières de notre voiture. Il n’y a pas encore de dommages » et il y a une autre communication à 6 h 33, indiquant que le plaignant était [traduction] « en train de se cogner la tête contre la voiture » et que l’ambulance arrivait sur ces entrefaites. À 6 h 38, une communication en provenance de la voiture de patrouille signale que les agents vont amener « ce monsieur » à l’hôpital et qu’en raison de son comportement, [traduction] « ce serait bien si une couple de gars pouvaient nous rencontrer là-bas ». La dernière transmission indique que les agents dans la voiture de patrouille n’ont [traduction] « pas de préoccupations au sujet de blessures physiques, mais qu’il est pas mal agité ». À 6 h 38, la voiture de patrouille de l’AI est en route vers l’hôpital et l’ambulance la suit et on demande à l’hôpital de préparer un lit avec des moyens de contention en prévision de l’arrivée du plaignant.

Au cours de l’interaction du plaignant avec la police, la préposée aux appels a reçu trois autres appels au numéro 9-1-1, le deuxième appelant étant un voisin dans la même rue qui l’a informée que [traduction] « quelqu’un dans ma rue crie à l’aide, à l’aide, je suis blessé », la troisième personne a dit que [traduction] « quelqu’un est en train de devenir fou » et la dernière personne qui a appelé a indiqué qu’il y avait beaucoup de hurlements derrière sa maison. Chaque fois, la préposée a assuré aux interlocuteurs que la police était déjà sur les lieux.

Les dossiers médicaux du plaignant révèlent qu’il a été examiné à 6 h 55, et sous la raison de la visite, le personnel a mis « Intoxiqué/violent ». Voici les renseignements entrés dans le dossier :

[traduction]

À 7 h 26 h, on a mis une ceinture abdominale et des entraves aux chevilles du plaignant sans lui ôter les menottes et, sur l’ordre du médecin, un calmant lui a été administré;

À 7 h 45, des moyens de contention mous ont été appliqués aux poignets et aux épaules du plaignant. « Le pt (patient) continue de jurer, est agité ++ »;

À 8 h 05, on lit « Pt agité ++ les cinq points de contention sont maintenus. Le pt a fait tomber la civière sur le côté gauche. Aucune nouvelle blessure. Le pt ne s’est pas cogné la tête. Médecin prévenu »;

À 8 h 10, on lit « Continue de crier ++ – est toujours agité. Essaye de sortir des moyens de contention. Calmant administré »;

À 8 h 40, 9 h 05, 9 h 15 et 9 h 20, le plaignant est continuellement décrit comme agité; il continue de crier et de jurer, et les moyens de contention sont maintenus. À 9 h 20, on a dû lui administrer un calmant pour la troisième fois;

À 9 h 54, on fait les mêmes observations et on administre un calmant au plaignant une quatrième fois;

À 10 h 50 et à 11 h 05, le plaignant étant toujours agité, on lui administre un calmant une cinquième et sixième fois;

Enfin, à 11 h 25, le plaignant est décrit comme se reposant tranquillement et les moyens de contention aux épaules sont retirés;

À 12 h 40, le plaignant est décrit comme étant toujours somnolent et les entraves aux chevilles sont retirées et on décide qu’il recevra son congé de l’hôpital; et

À 13 h 34, le plaignant obtient son congé de l’hôpital.

Les dossiers du plaignant indiquent en outre qu’en raison des plaintes formulées par lui au sujet de blessures, son poignet droit et son bassin ont été radiographiés et comparés à l’information antérieure au dossier, et aucune nouvelle blessure n’a été constatée. Il a également subi un tomodensitogramme de la tête qui n’a révélé aucune blessure.

L’analyse toxicologique du plaignant a révélé que le plaignant avait 59 millimoles d’alcool par litre de sang (ou 272 milligrammes d’alcool par 100 mg de sang), environ trois fois et demi la limite légale pour conduire un véhicule automobile.

Les dossiers médicaux du plaignant révèlent en outre que le plaignant s’est rendu à un deuxième hôpital le 11 septembre 2016, où il a informé le personnel médical de ce qui suit :

[traduction]

Le patient (pt) affirme qu’il a été mêlé à une altercation avec la police. Le pt indique qu’on l’a maintenu au sol en poussant le côté gauche de son visage dans le sol. Un genou a été poussé contre ses côtes du côté droit. Il a été traîné sur le sol. Il y a de nombreuses abrasions superficielles aux jambes et au haut de la tête. Le pt a le poignet endolori à cause de menottes serrées.

À cette occasion, on a de nouveau pris une radiographie du poignet droit du plaignant, qui a révélé une fois de plus que les blessures étaient vieilles. À ce moment-là, on a toutefois aussi pris une radiographie de ses côtes et le diagnostic était qu’il avait [traduction] « des fractures aiguës légèrement déplacées aux côtes 5 et 6 à droite et des anciennes fractures aux côtes du côté gauche ».

Le 20 septembre 2016, le plaignant est retourné à cet hôpital une deuxième fois et a subi une troisième radiographie du poignet droit; encore une fois, les résultats indiquaient qu’il avait des fractures chroniques (anciennes) et des changements dégénératifs sévères, mais pas de nouvelles blessures.

L’AI a indiqué que le 10 septembre 2016, lui-même et l’AT, son partenaire, se déplaçaient dans un VUS de patrouille identifié et qu’il n’y avait pas d’entraves pour les jambes dans leur véhicule. À 6 h 14, les agents ont reçu un appel leur demandant de se rendre à une résidence en réponse à un incident familial; ils y sont arrivés à 6 h 15 h et ont garé leur voiture de patrouille devant la maison. L’AI a constaté que le plaignant se tenait debout de l’autre côté de la rue près d’une voiture stationnée et il lui a demandé son nom pour voir s’il était impliqué, auquel moment le plaignant a immédiatement commencé à crier contre lui; l’AI a constaté que l’haleine du plaignant sentait l’alcool, qu’il avait de la difficulté à articuler et qu’il semblait s’appuyer sur la voiture pour garder son équilibre. L’AI a informé le plaignant qu’il était là pour enquêter sur un incident familial, et le plaignant [traduction] « a commencé à lui dire d’aller se faire foutre » et criait sans cesse et parlait très fort en utilisant un langage extrêmement vulgaire. L’AI a vu le TC no 1 venir vers lui dans son entrée, et elle lui a dit que le plaignant avait placé ses mains sur elle et qu’elle voulait qu’il quitte sa propriété. Alors que le TC no 1 retournait à sa résidence, le plaignant a tenté de la suivre et criait contre elle et l’AT a levé la main pour l’empêcher de le faire. L’AI a indiqué qu’il avait alors dit au plaignant de se calmer et avait vu plusieurs personnes sortir de chez elles pour voir ce qui se passait. Selon l’AI, l’AT a alors mis le plaignant en état d’arrestation pour avoir causé des troubles et l’AI a pris le bras gauche du plaignant pour le mettre en état d’arrestation, alors que le plaignant continuait de crier. L’AI a alors placé le plaignant contre le véhicule du TC no 1, et l’AT l’a menotté dans le dos. Pendant que les agents fouillaient le plaignant, selon le témoignage de l’AI, le plaignant a soudainement crié que son poignet était cassé, bien que l’AI ne pouvait pas voir si quelque chose avait été déplacé. L’AI a indiqué que le plaignant s’est alors soudainement laissé tomber au sol et a crié qu’il avait une hanche fracturée; l’AI a dit au plaignant d’arrêter de crier, mais il a continué à crier [traduction] « aidez-moi ». Puis, l’AI a roulé le plaignant sur le ventre afin qu’il ne repose pas sur ses mains en raison de sa plainte d’un bras cassé et a appelé les ambulanciers. L’AI a précisé que pendant qu’il appelait les ambulanciers, le plaignant s’était vite retourné et avait commencé à donner des coups de pied à l’AT et qu’il pensait que l’AT était tombé au sol. L’AI a indiqué qu’il pensait que l’AT était peut-être blessé et qu’il voulait prévenir une agression, de sorte qu’il s’est placé sur le plaignant et lui a rapidement donné un coup de pied au visage pour le distraire, et ce dernier a immédiatement cessé de donner des coups de pied et s’est calmé momentanément.

L’AI a indiqué que lui et l’AT avaient alors levé le plaignant pour le remettre debout et l’avaient amené à la voiture de patrouille, le plaçant à l’arrière, et qu’il était toujours agité. L’AI et l’AT ont ensuite discuté avec le TC no 1, qui les a informés que le plaignant avait eu un grave accident cinq ans auparavant durant lequel il avait subi des fractures aux hanches et à un bras. L’AI a expliqué que, pendant qu’il parlait au TC no 1, le plaignant continuait de crier et qu’il a commencé à donner des coups de pied à la lunette arrière du véhicule. L’AI a indiqué qu’il était retourné à la voiture de patrouille et qu’il avait dit au plaignant d’arrêter, et que ce dernier avait commencé à se cogner la tête contre la cage en métal à l’intérieur du véhicule et qu’il continuait de crier et de hurler et de tenir un langage grossier.

Les ambulanciers sont arrivés, mais comme le plaignant n’arrêtait pas de crier et de hurler, il y avait un problème de sécurité. La vitre de la voiture de patrouille était ouverte et les ambulanciers ont parlé au plaignant, qui a dit qu’il ne voulait pas d’aide. L’AI a indiqué qu’il craignait que le plaignant soit sous l’influence d’une drogue et lui-même et son collègue ont donc demandé que l’ambulance suive leur véhicule, au cas où le plaignant se retrouverait dans un état de détresse médicale durant le trajet. À 6 h 51, ils sont arrivés à la salle d’urgence de l’hôpital et ont amené le plaignant au lit qui lui était réservé, en étant obligés de le porter la moitié du temps, et une fois couché, on lui a passé des moyens de contention, mais il a continué à se débattre et à cracher sur le plancher. L’AI a indiqué qu’il avait entendu dire que l’AT avait peut-être une entaille à son bras et que, parce qu’il craignait une possible contamination, il était resté avec l’AT pendant qu’il attendait que le personnel médical le laisse partir, et d’autres agents qui étaient arrivés l’hôpital sont restés avec le plaignant. L’AI et l’AT ont ensuite quitté l’hôpital à 8 h 44. L’AI a constaté que l’AT avait une légère abrasion au tibia, à l’endroit où le plaignant lui avait donné un coup de pied.

L’AI a indiqué qu’il n’avait jamais donné de coup de pied dans les côtes du plaignant et que le plaignant ne s’était jamais plaint de douleur à ses côtes. L’AI a indiqué qu’il était d’avis qu’il avait été nécessaire de frapper le plaignant au visage pour « prévenir d’autres voies de fait contre son partenaire ».

La déclaration de l’AT corrobore essentiellement celle de l’AI. L’AT a de nouveau confirmé que lui et l’AI n’avaient pas d’entraves pour les jambes à l’époque et que les jambes du plaignant n’avaient jamais été immobilisés. Il a également souligné que l’haleine du plaignant sentait l’alcool, qu’il était instable, qu’il avait de la difficulté à articuler, qu’il criait très fort, qu’il était agressif et qu’il refusait de répondre aux questions des agents. L’AT a également précisé que lorsqu’il avait mis la main sur la poitrine du plaignant et lui avait dit d’arrêter, le plaignant était devenu encore plus bruyant et plus agressif verbalement et a répété à maintes reprises qu’il allait déposer une plainte contre les agents et qu’ils n’étaient pas autorisés à le toucher. Le plaignant a continuellement pointé un doigt et secoué son poing vers l’un ou l’autre des agents et serrait sa mâchoire. L’AT a indiqué qu’à 6 h 18, il a été décidé que le plaignant serait arrêté pour avoir causé des troubles et il a été placé contre la voiture et menotté par l’AT, après quoi le plaignant a été fouillé pour assurer la sécurité des agents. L’AT a indiqué que le plaignant s’était alors mis à crier encore plus fort qu’avant, ce qui était tout un exploit, et il a commencé à hurler au sujet de douleur au poignet droit. Pendant que l’AT contrôlait le bras droit du plaignant, il s’est affaissé et s’est mis sur les genoux et puis sur le ventre. Selon l’AT, une fois par terre, le plaignant a commencé à se rouler sur le sol et a continué de crier pendant que les agents essayaient de le maintenir sur son ventre et ont même proposé de relâcher un peu les menottes s’il obéissait aux exigences des agents et s’il se calmait, mais il a continué à crier, à jurer, à se rouler sur le sol et à cracher dans la direction des agents. L’AT a indiqué qu’il avait vérifié les menottes lorsque le plaignant s’était plaint qu’elles étaient trop serrées et qu’elles ne l’étaient pas; et qu’il n’avait pas utilisé plus de force pour les appliquer qu’il ne le faisait à l’ordinaire.

D’après le témoignage de l’AT, à un moment donné, lorsqu’il se penchait à côté du plaignant, celui-ci s’était brusquement retourné et lui avait donné un coup de pied à la jambe, ce qui lui avait fait faire un bond pour éviter d’autres coups, mais il y avait eu un contact avec sa jambe et son tibia. L’AI a alors rapidement donné un coup au visage du plaignant pour le distraire, et le plaignant s’est vite calmé. L’AT a également vu le plaignant donner des coups de pied dans la lunette arrière de la voiture de patrouille et puis se cogner la tête contre la grille, ce qui avait causé des abrasions au visage. L’AT a également ajouté que lorsque les ambulanciers sont arrivés, ils ont refusé d’amener le plaignant à l’hôpital avant qu’il se calme et que lui et l’AI ont donc transporté le plaignant à l’hôpital où le personnel médical l’a placé sur une civière et lui a appliqué des moyens de contention et que lui, c’est-à-dire l’AT, a également été traité pour la blessure qu’il avait subie lorsque le plaignant lui avait donné un coup de pied. L’AT a indiqué qu’il n’a jamais juré ni utilisé un langage blasphématoire à l’endroit du plaignant et que ni lui ni l’AI avaient jamais donné de coup de pied au plaignant.

Il ressort clairement de l’examen de l’ensemble de la preuve que le plaignant était complètement hors contrôle aux premières heures du matin le 10 septembre 2016; cela est confirmé par les témoignages des TC nos 1, 2 et 3, ainsi que par les propos de l’appelant au numéro 9-1-1, qui a dit que [traduction] « quelqu’un est en train de devenir fou », et par le personnel hospitalier et les témoignages de l’AT et de l’AI. De plus, le fait que le plaignant était hors contrôlé, combatif, récalcitrant et violent est clairement consigné dans les dossiers médicaux du plaignant, selon lesquels ce dernier était encore agité, criait et jurait plus de quatre heures après son admission, que les cinq moyens de contention appliqués ne pouvaient être retirés avant que le plaignant n’ait reçu un calmant à six reprises et qu’à un moment donné, il était tellement violent qu’il avait renversé la civière. De plus, il ne semble y avoir aucun doute que le plaignant était intoxiqué par de l’alcool et/ou des drogues, comme l’a confirmé l’analyse de sang et comme l’a confirmé le TC no 1.

Outre le degré d’intoxication du plaignant et son comportement agressif et violent à l’époque de l’incident, le plaignant semble avoir peu de crédibilité, voire aucune. Lors de son interaction avec la police, il semblait n’avoir aucun scrupule à évoquer des blessures antérieures qu’il avait subies lors d’un accident de la route quelques années auparavant et à faire semblant qu’il venait tout juste de subir ces blessures aux mains de la police. De plus, les détails fournis dans sa déclaration concernant le nombre d’agents et de véhicules de patrouille présents et l’utilisation d’entraves aux jambes sont inexplicables et contredits non seulement par les trois témoins civils qui ont vu l’interaction avec la police, en partie ou dans son entièreté, mais aussi par le tableau de service et les enregistrements des communications. À aucun moment il n’y a eu plus de deux agents de police et une voiture de patrouille à la résidence et les agents n’ont jamais appliqué des entraves aux jambes du plaignant; cette affirmation est contredite non seulement par l’AT et l’AI, mais confirmé aussi par le TC no 1.

De toute évidence, ces écarts dans la preuve fournie par le plaignant seraient plus que suffisants pour miner sérieusement toute crédibilité que ce dernier aurait pu avoir, sans mentionner toutes les autres contradictions, y compris sa déclaration au personnel médical qu’il n’avait bu que quatre bières et avait pris quelques valium et son affirmation au médecin le 20 septembre que la police l’avait « traîné » lorsqu’il était sur le sol, une allégation qu’il n’a faite qu’une seule fois et qui était absente durant sa déclaration aux enquêteurs. Toutefois, lorsque les incohérences sont combinées à son comportement sur les lieux et à l’hôpital par la suite, je ne peux accorder quelque poids que ce soit au témoignage du plaignant. Je ne peux que conclure que le plaignant est très habile à manipuler la vérité à son propre avantage et à embellir et à exagérer les faits, ou qu’en raison de son état d’ébriété grave, il n’a vraiment aucun souvenir des événements.

Dans sa déclaration, le plaignant a décrit trois plaintes. En ce qui concerne la première plainte selon laquelle l’AI l’aurait jeté au sol, je ne suis pas en mesure de conclure qu’il existe des motifs raisonnables pour déterminer que cela s’est produit, puisque cette allégation est directement contredite par la preuve fournie par le TC no 1.

Je ne peux accorder quelque crédibilité que ce soit à la version des faits offerte par le plaignant, mais je conclus qu’il est plus que probable qu’il se soit retrouvé sur le sol de la manière décrite aussi bien par l’AI que par l’AT, c’est-à-dire qu’il s’est affaissé et a laissé tomber tout son poids sur le sol délibérément pour ensuite crier que sa hanche avait été cassée. Je conclus que cette version des événements est également appuyée par l’autre comportement du plaignant, lorsqu’il a prétendu, avec véhémence, que la police l’avait blessé alors que toutes les blessures dont il se plaignait étaient préexistantes.

En ce qui concerne la deuxième plainte du plaignant, c’est-à-dire que l’AI lui avait mis les menottes en les serrant trop, je conclus qu’il est fort probable que le plaignant, qui se débattait et était combatif, a causé le resserrement des menottes si elles n’étaient pas bloquées à double tour. Même si elles étaient trop serrées, ce que je n’accepte pas, je ne peux aucunement jeter le blâme sur l’un ou l’autre des agents de police, s’ils ont refusé de desserrer les menottes, parce que le plaignant était tellement hors contrôle; en fait, j’estime qu’il aurait été insensé de le faire alors que le plaignant était aussi combatif et agressif. Je serais toutefois davantage porté à croire que, compte tenu du comportement du plaignant dans l’ensemble, son allégation selon laquelle les menottes étaient trop serrées constituait simplement une autre ruse dont il pouvait se servir pour prétendre que sa blessure au poignet était causée par la police.

Me tournant vers la dernière plainte du plaignant, c’est-à-dire que le troisième agent lui a donné un coup de pied aux côtes et a causé ses blessures, il est bien sûr évident qu’il n’y avait pas de troisième agent. En supposant, toutefois, que le témoignage du plaignant ait pu être confus en raison de son grave état d’intoxication, je ne suis pas en mesure de conclure qu’il existe des motifs raisonnables de croire que l’AT ou l’AI a donné un coup de pied au plaignant dans les côtes. J’arrive à cette conclusion pour les raisons suivantes :

Le plaignant n’hésitait pas à parler haut et fort de ses blessures au poignet et à la hanche; si, en fait, il avait reçu un coup de pied dans les côtes et qu’il avait ressenti de la douleur instantanément, comme il l’allègue, je me serais certainement attendu qu’il se plaigne tout autant, sinon plus, de cette réelle blessure, comme il l’a fait pour les autres blessures qu’il prétendait avoir; il n’est donc pas possible de trouver des motifs raisonnables de croire que l’un ou l’autre des agents lui a donné un coup de pied dans les côtes.

Bien que la découverte de deux fractures légèrement déplacées aux cinquième et sixième côtes puisse être considérée comme corroborant l’allégation du plaignant selon laquelle l’AT lui a donné un coup de pied aux côtes durant l’incident, je ne puis conclure que c’est le cas pour les raisons suivantes :

Aucune blessure n’a été constatée le 10 septembre, lorsque le plaignant a été transporté à l’hôpital immédiatement après l’interaction avec la police;

Le plaignant ne s’est aucunement plaint de douleur ou de blessure à ses côtes, bien qu’il se soit longuement plaint des autres blessures;

Le plaignant s’est délibérément laissé tomber au sol, s’est cogné la tête contre la voiture de patrouille, a donné plusieurs coups de pied à la lunette arrière du véhicule et a renversé la civière sur laquelle il était attaché, entraînant sa propre chute; tout cela aurait pu causer une blessure au plaignant;

Les blessures aux côtes ont seulement été diagnostiquées le 11 septembre, date à laquelle le plaignant s’est rendu à un autre hôpital, alléguant une blessure et de la douleur alors qu’on n’avait constaté aucune blessure à l’hôpital immédiatement après l’interaction avec la police. Compte tenu du manque de crédibilité du plaignant, des blessures qu’il faisait semblant d’avoir, de son comportement autodestructeur et de l’intervalle entre sa première visite à l’hôpital et sa deuxième visite à l’hôpital, je ne puis conclure qu’il y a des motifs raisonnables de croire que la blessure a été causée par la police, car il est plus probable qu’il s’est blessé ou a été blessé d’une autre façon durant la période entre les visites à l’hôpital.

En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police peuvent seulement recourir à la force qui est raisonnablement nécessaire dans l’exécution d’une obligation légale. Me penchant d’abord sur la légalité de l’appréhension du plaignant, il ressort clairement des déclarations des témoins civils et des observations de l’AI et de l’AT que le plaignant était intoxiqué, qu’il était bruyant, qu’il criait et qu’il jurait et qu’il causait généralement des troubles dans un endroit public tôt le matin du 10 septembre 2016 et qu’il pouvait donc être arrêté parce qu’il troublait la paix en contravention de l’alinéa 175(1)a) du Code criminel en se battant, en criant, en vociférant et en jurant et (2) en étant ivre, mais aussi en contravention de la Loi sur les permis d’alcool en étant en état d’ivresse dans un lieu public. Par conséquent, l’arrestation du plaignant était justifiée légalement dans les circonstances.

En ce qui a trait à la force utilisée par les agents dans leurs tentatives pour maîtriser le plaignant, je conclus que leur comportement était plus que justifié dans les circonstances et qu’ils n’ont pas utilisé plus de force que nécessaire pour maîtriser le plaignant, qui était clairement hors contrôle, combatif, agressif et extrêmement intoxiqué. Compte tenu du fait que le plaignant avait déjà donné un coup de pied à l’AT, il n’était pas exagéré de conclure qu’il était capable de le faire de nouveau, si on ne réussissait pas à l’en dissuader. Ainsi, je conclus que la décision de l’AI de frapper le plaignant au visage pour le distraire était justifiée et que ce geste avait eu l’effet souhaité en ce sens que le plaignant avait alors cessé de donner des coups de pied. Pour en arriver à cette conclusion, je suis conscient de l’état du droit tel qu’énoncé par la Cour suprême du Canada dans l’affaire R. c. Nasogaluak, [2010] 1 S.C.R. 206, comme suit :

Les actes des policiers ne devraient pas être jugés au regard d’une norme de perfection. Il ne faut pas oublier que ceux‐ci accomplissent un travail exigeant et dangereux et qu’ils doivent souvent réagir rapidement à des situations urgentes. Leurs actes doivent alors être appréciés selon ce que commande ce contexte difficile. Comme le juge Anderson l’explique dans R. c. Bottrell (1981), 60 C.C.C. (2d) 211 (C.A.C.‐B.) :

[traduction] Pour déterminer si la force employée par le policier était nécessaire, les jurés doivent tenir compte des circonstances dans lesquelles le policier y a eu recours. Il aurait fallu leur indiquer qu’on ne pouvait s’attendre à ce que l’appelant mesure la force appliquée avec précision. [p. 218]

Je note que le plaignant ne s’est jamais plaint du coup au visage ni a jamais déclaré avoir reçu un tel coup et qu’il n’a subi aucune blessure attribuable à ce coup. En ce qui concerne la blessure aux côtes du plaignant, je ne peux trouver aucune preuve crédible permettant de conclure que cette blessure a été causée par son interaction avec la police. Me fondant non seulement sur le témoignage de l’AI et de l’AT, mais aussi sur celui du TC no 1, je ne puis trouver aucun acte de la part de l’agent qui a causé quelque blessure que ce soit au plaignant. Compte tenu du comportement extrêmement violent et combatif du plaignant non seulement sur les lieux, mais observé également par le personnel hospitalier, je conclus que l’AT et l’AI semblent avoir exercé une grande retenue dans leur interaction avec le plaignant et qu’aucun recours excessif à la force n’a été exercé par aucun des agents.

Dans ce dossier, il est clair que la force utilisée tant par l’AT que par l’AI était minimale et qu’elle progressait de manière mesurée et proportionnée pour répondre et mettre fin au comportement agressif du plaignant, et elle tombe dans les limites de ce qui était raisonnablement nécessaire dans les circonstances pour prévenir toute autre agression contre les agents et pour assurer la mise en détention légale du plaignant.

En dernière analyse, je suis convaincu, pour les motifs qui précèdent, que la mise en détention du plaignant et la façon dont elle s’est faite étaient légitimes et qu’il n’y a aucun lien causal entre la blessure diagnostiquée le 11 septembre et les actions des agents le 10 septembre. Je suis donc convaincu, pour des motifs raisonnables, que les actions exercées par les agents sont conformes aux limites prescrites par le droit criminel et qu’il n’y a pas lieu de porter des accusations en l’espèce.

Date : 3 octobre 2017

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.