Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-OCI-082

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves subies par un homme de 54 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 15 mars 2021, à 13 h 48, le Service de police de Hamilton (SPH) a avisé l’UES de la blessure du plaignant et donné le rapport qui suit.

Le 14 mars 2021, vers 16 h, des agents du SPH ont répondu à un appel concernant une querelle familiale en cours dans un appartement de la rue Main. À leur arrivée sur les lieux, comme le plaignant refusait d’ouvrir, les agents ont tenté de forcer la porte. Quand les agents sont parvenus à entrer, une lutte s’est ensuivie avec le plaignant dans l’appartement. Le plaignant a été arrêté pour voies de fait graves, pour les blessures graves subies par son beau-père qui a été trouvé sans connaissance, grièvement blessé au visage et avec des difficultés à respirer.

Le plaignant a été conduit au poste principal du service de police, où il s’est battu avec des agents dans le couloir et dans la cellule de détention de la Division des enquêtes criminelles (DEC).

Le lendemain, le plaignant a été conduit à l’Hôpital général de Hamilton (HGH), où on lui a diagnostiqué une fracture de côtes sur la gauche du torse.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 15 mars 2021 à 14 h 13.

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 15 mars 2021 à 16 h 15.

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Les enquêteurs de l’UES ont mené une entrevue avec le plaignant et, avec son autorisation écrite, ont obtenu des copies des dossiers médicaux pertinents, y compris le rapport d’appel d’ambulance. 

Les enquêteurs de l’UES ont également mené des entrevues avec des témoins civils et de la police et ont obtenu une vidéo pertinente pour l’enquête. 

Le SPH a ouvert une enquête criminelle parallèle sur les circonstances entourant l’interaction du plaignant avec son beau-père avant l’arrivée de la police. L’UES a obtenu une copie du rapport d’identification médicolégale du SPH

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 54 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 15 mars 2021.


Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue entre le 15 et le 17 mars 2021.

Agents impliqués

AI no 1 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées
AI no 2 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées
AI no 3 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées
AI no 4 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

Les agents impliqués ont participé à une entrevue le 26 mars 2021. 


Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue
AT no 4 A participé à une entrevue
AT no 5 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue entre le 17 et le 23 mars 2021. 


Témoins employés du service (TES)

TES no 1 A participé à une entrevue
TES no 2 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue les 17 et 18 mars 2021.


Éléments de preuve

Les lieux

Le 15 mars 2021, à 16 h 15, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est rendu au poste de police pour prendre des photographies et obtenir des éléments de preuve pertinents.

La salle d’enregistrement est au sous-sol de l’immeuble. Cette salle est reliée à de nombreuses sections qui abritent des cellules de détention individuelles.

La cellule où le plaignant avait été logé était dans la section des hommes adultes. Elle était scellée. La cellule comporte une porte coulissante sécurisée en plexiglas transparent, une couchette en béton surélevée et une toilette avec lavabo attenant. Des morceaux de papier hygiénique jonchaient le sol.

Figure1 — La cellule du plaignant.

Chaque cellule est équipée d’une caméra de surveillance fixée sur le mur opposé à la porte. De plus, de nombreuses caméras de surveillance sont fixées au plafond pour surveiller l’activité dans les corridors. Située à l’extrémité ouest de la section des cellules, la salle d’enregistrement commune est également surveillée par des caméras de surveillance fixées au plafond et sur les murs. Au bureau d’enregistrement, des écrans de surveillance affichent la vidéo de surveillance de chaque cellule et de chaque corridor. Il y a un corridor à l’est de la salle d’enregistrement et au sud du corridor de la section des cellules pour hommes. Ce corridor mène au bureau du sergent de sécurité de service, à la salle des empreintes digitales, aux cellules pour femmes et à la porte de sortie de l’ascenseur. Les aires mentionnées ci-dessus ont été photographiées et examinées, et aucun élément de preuve n’y a été trouvé.

L’ascenseur sert à transporter les prisonniers vers les bureaux de la DEC au deuxième étage, dont l’accès est contrôlé par un système à cartes. Il n’y a pas de caméras de surveillance dans les couloirs ou dans le bureau principal. Sur la porte d’accès, une note manuscrite indiquait de ne pas utiliser le numéro 4. Une politique et une procédure étaient également été apposées sur la porte indiquant de vérifier les personnes détenues toutes les 15 minutes.

Au-delà de l’entrée du bureau de la DEC, il y a un petit hall au sud, qui contient des petites pièces individuelles pour les prisonniers. La salle de stockage temporaire n° 4 était scellée avec un panneau sur la porte indiquant de ne pas utiliser cette salle no 4. Cette porte comporte une petite fenêtre et une serrure à barillet coulissant. Elle était verrouillée. Il y avait dans cette pièce une petite table en métal et un banc en métal fixé au mur. Une tache rouge était visible sur la surface du banc; un échantillon y a été prélevé et référencé comme indice n° 1. Les aires susmentionnées du poste de police ont été photographiées.


Figure 2 — La tache rouge sur la table du local d’entreposage temporaire no 4 du bureau de la DEC.

À 19 h, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est rendu à l’appartement de la rue Main. La porte de l’appartement, qui s’ouvre vers l’intérieur, était endommagée au niveau du mécanisme de verrouillage. Quand on entre, la cuisine est à gauche, et à droite du salon en forme de « L », un long couloir conduit aux chambres et aux salles de bains. Des empreintes de pieds ensanglantées étaient visibles dans le couloir menant à la chambre.

L’interaction du plaignant avec la police s’est produite dans le salon, qui était encombré et très confiné. Il y avait deux étagères qui avaient été éloignées du mur et un canapé à trois places devant le mur. Il y avait par terre, devant un repose-pieds noir, un téléphone dont la pile était visible.

Il y avait peu de preuves de troubles dans le salon.

Éléments de preuve matériels

L’UES a obtenu la cartouche vide du pistolet à impulsions de l’AI no 3.

Le seul autre élément de preuve matériel était l’échantillon d’une tache rouge prélevé sur le banc de la cellule no 4 de la DEC.

Éléments de preuves médicolégaux

Données téléchargées à partir du pistolet à impulsions

Le 15 mars 2021, l’UES a photographié et téléchargé les données de deux pistolets à impulsions. L’un de ces pistolets n’avait pas été utilisé à la date et à l’heure de l’incident.

Taser modèle X2 

Ce pistolet à impulsions était celui de l’AI no 3. L’UES a obtenu les renseignements suivants à partir des données de ce Taser le 15 mars 2021.

Le 14 mars 2021, à 17 h 31 min 41 s [1], l’AI no 3 a armé le Taser. À 17 h 31 min 54 s, l’AI no 3 a déclenché un arc d’une seconde sans déploiement de cartouches. À 17 h 32 min 14 s, l’AI no 3 a déployé la première des deux cartouches pendant un cycle de 27 secondes. L’AI no 3 a redéployé la première cartouche pendant 23 secondes à 17 h 32 min 55 s, puis pendant 13 secondes à 17 h 33 min 23 s.



Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [2]

L’UES a recherché des photographies et des enregistrements audio et vidéo pertinents et obtenu ce qui suit :

Communications du 9-1-1 du SPH

Le 24 mars 2021, l’UES a reçu les enregistrements de communications pertinents du SPH. Un résumé des éléments importants qu’ils contiennent est donné ci-après.

Le 14 mars 2021, à 15 h 52, une femme bouleversée [maintenant connue pour être la TC no 1] appelle le 9-1-1 pour signaler que son fils, le plaignant, a battu son mari à mort. On entend en arrière-plan la TC 1 dire au plaignant qu’elle va lui tirer dessus parce qu’il a blessé son mari. Le plaignant répond [traduction] « Vas-y ».

La TC no 1 dit à l’opératrice du 9-1-1 que le plaignant a frappé son mari avec une lampe et l’a tué. Un plaignant essoufflé dit à l’opératrice du 9-1-1 : [traduction] « Il y a un salaud de nazi ici. Je l’ai tué. Il ne méritait pas d’être ici. » Le plaignant dit qu’on devrait le féliciter, lui donner 10 000 $ et une arme à feu pour lui tirer dessus [sur le mari de sa mère].

Pendant que le plaignant fait ses demandes, les agents arrivés sur les lieux lui demandent d’ouvrir la porte à plusieurs reprises et on peut entendre des coups sur une porte. En jurant, le plaignant répond aux agents de ne pas s’approcher.

Communications radio

À 15 h 52 min 50 s, une priorité « 0 » pour troubles familiaux en cours rue Main est diffusée sur la radio de la police. L’AI no 1, l’AI no 2, l’AT no 2 et l’AT no 3 répondent à la demande d’intervention. Alors que l’opératrice du 9-1-1 est en ligne avec la TC no 1, le plaignant déclare [traduction] : « Il y avait un nazi ici. Je l’ai tué. » Les services médicaux d’urgence (SMU) de Hamilton arrivent sur les lieux et attendent devant l’immeuble.

À 15 h 59, une vérification de personne et d’adresse concernant le plaignant donne des résultats négatifs. La TC no 1 dit à l’opératrice du 9-1-1 qu’elle attendra la police dans le hall de l’immeuble.

À leur arrivée à l’appartement, l’AI no 1, l’AI no 2, l’AT no 2 et l’AT 3 trouvent la porte verrouillée. Le plaignant refuse d’ouvrir la porte à la police, déclare qu’il ne veut pas qu’on porte une accusation contre lui et demande qu’on le félicite. L’AT no 3 s’en va pour aller chercher le bélier pour enfoncer la porte.

Alors que le plaignant est toujours au téléphone avec l’opératrice du 9-1-1, l’AT no 2 annonce qu’ils ont ouvert la porte de l’appartement.

À 16 h 04, l’AT no 3 annonce que le plaignant est sous garde. L’AT no 2 demande que les ambulanciers paramédicaux interviennent rapidement car un homme saigne abondamment à la tête. L’AT no 3 dit que l’homme est sans connaissance, qu’il a de graves blessures au visage et qu’il respire difficilement.

À 16 h 30, l’AI no 2 demande qu’une deuxième unité des SMU vienne sur les lieux pour évaluer le plaignant. Étant donné le comportement du plaignant dans le véhicule de police et sa manœuvre pour glisser ses bras menottés à l’avant de son corps, l’AT no 3 pense qu’il présente une menace possible pour les ambulanciers paramédicaux et les agents de police. À 16 h 52, le bureau de garde est avisé de l’arrivée du plaignant au poste et de son évaluation par les ambulanciers paramédicaux dans la baie de sécurité.

Le 15 mars 2021, à 7 h 29 du matin, une demande de transport de détenu à l’hôpital pour de possibles fractures de côtes est diffusée via le centre de communication.

Vidéo de l’aire des cellules du SPH

Le 17 mars 2021, l’UES a reçu l’enregistrement vidéo de la garde du plaignant au poste du SPH. Cet enregistrement comprenait des séquences du garage de sécurité, du bureau d’enregistrement, des corridors et des couloirs. L’aire de détention de la DEC n’avait pas de caméras de surveillance. Les vidéos étaient horodatées, en couleur et sans fonction audio. Un résumé des éléments importants de ces vidéos est donné ci-après.

À 17 h 28, le plaignant, menotté à l’avant, est escorté du garage de sécurité jusqu’à la salle d’enregistrement. L’AI no 2 est à gauche du plaignant et l’AI no 1 à sa droite; l’AI no 3 est à environ une longueur de bras devant eux.

Avant d’entrée dans le corridor « L », le plaignant recule vers le bureau d’enregistrement. L’AI no 2 lui saisit le bras gauche et commence à le pousser en avant. Le plaignant fait quelques pas, puis s’arrête de nouveau; l’AI no 1 lui saisit le bras droit. Tandis que l’AI no 1 et l’AI no 2 l’escortent vers le corridor « L », le plaignant résiste en tentant de s’écarter et en semblant refuser d’avancer.

Après quelques pas de plus, le plaignant s’arrête; l’AI no 3 réagit en lui saisissant les mains pour continuer d’avancer. L’AT no 5 arrive en renfort. Après quelques pas de plus, le plaignant s’arrête et agrippe la taille et la jambe gauche de l’AI no 3 avec ses jambes, puis tombe à plat ventre; l’AI no 2 atterrit sur lui. L’AI no 3 semble trébucher, mais parvient à maintenir son équilibre, debout près des pieds du plaignant.

Une fois par terre, le plaignant s’agite et résiste aux efforts des agents qui tentent de maintenir le contrôle de ses mains qu’il fait passer par-dessus sa tête, puis sous son torse. Lorsqu’il soulève sa tête du plancher, on peut voir ses mains sous son torse. L’AT no 4 et l’AT no 5 sont debout près des pieds du plaignant, l’AT no 2 est à droite de ses épaules et l’AT no 1 à gauche de son torse.

Le TES no 1 entre dans le corridor et donne un jeu de chaînes à l’AT no 4 pour attacher les chevilles du plaignant. Alors que le plaignant continue de se débattre, l’AI no 4 entre dans le corridor et s’agenouille à gauche du plaignant pour aider ses collègues. À 17 h 29, l’AI no 3 s’agenouille à gauche du haut torse du plaignant; on peut voir une lumière rouge, vraisemblablement celle d’un pistolet à impulsions. Comme plusieurs agents en uniforme dans le couloir s’efforçaient de surmonter la résistance du plaignant, il est difficile de déterminer exactement les actes individuels de chacun des agents impliqués.

À 17 h 33, on aide le plaignant à se relever. Il est menotté dans le dos et ses chevilles sont enchaînées. L’AI no 1 et l’AI no 2 tiennent les bras du plaignant et l’AI no 3 les suit vers les ascenseurs.

À 18 h 59, le plaignant est escorté du corridor « L » à l’aire de détention. Il marche de son propre chef, mais semble souffrir du côté gauche.

À 19 h 08, le plaignant est dans la cellule 8 et semble se frotter le côté gauche du corps.

À 20 h 07, le plaignant semble se plaindre à une agente [maintenant connue comme étant l’AI no 4] d’une douleur aux côtes.

À 21 h 39, l’AI no 3 arrive devant la porte de la cellule et semble engager une conversation avec le plaignant.

Un examen du reste de la vidéo de la cellule n’a révélé aucun acte de la part du plaignant qui pourrait avoir causé sa blessure aux côtes ou y avoir contribué.

Vidéo de surveillance de la rue Main

Le 16 mars 2021, à 18 h 45, l’UES a obtenu une vidéo pertinente d’une caméra de surveillance de la rue Main. L’UES a appris que la vidéo avait une heure de retard sur l’heure réelle en raison du récent changement d’heure d’été. De ce fait, les heures indiquées ci-après ont été rajustées pour refléter l’heure réelle.

Le 14 mars 2021, à 15 h 55 min 22 s, une femme [maintenant connue pour être la TC no 1] prend l’ascenseur jusqu’au rez-de-chaussée. À 16 h 01 min 9 s, le premier agent [maintenant connu pour être l’AI no 1] arrive sur les lieux et entre dans l’ascenseur 2.

À 16 h 03 min 10 s, un deuxième agent [maintenant connu pour être l’AT no 3] arrive sur les lieux.

À 16 h 02 min 30 s, une agente [maintenant connu pour être l’AT no 2] arrive sur les lieux. À 16 h 02 min 35 s, un quatrième agent [maintenant connu pour être l’AI no 2] arrive sur les lieux. L’AI no 2 et l’AT no 2 courent vers l’escalier.

À 16 h 03 min 9 s, un sergent arrive sur les lieux et parle à la TC no 1 dans le hall d’entrée.

À 16 h 05 min 15 s, un agent et une agente arrivent les lieux et entrent dans l’ascenseur. Un autre agent parle à la TC no 1.

A 16 h 05, les pompiers arrivent sur les lieux.

À 16 h 10 min 15 s, l’AI no 1, l’AI no 2 et l’AT no 3 escortent le plaignant, qui est menotté dans le dos, de l’ascenseur au hall d’entrée. Le plaignant porte un jean et un tee-shirt. Il est calme quand l’AI no 1 et l’AI no 2 l’escortent jusqu’à la porte d’entrée. Il ne semble pas blessé.

À 16 h 17 min 55 s, le beau-père du plaignant, qui a subi un grave traumatisme crânien et facial, est placé sur une civière et conduit au rez-de-chaussée, par l’ascenseur, avec l’AT no 2 et trois ambulanciers.

Éléments obtenus auprès du service de police

Le SPH a remis les éléments suivants à l’UES entre le 17 mars et le 19 avril 2021 :
• Enregistrement audio des appels aux 9-1-1 et des communications;
• Opposition à la libération sous caution;
• Chronologie de l’incident;
• Scan 3D et photos des lieux;
• Rapport général (voies de fait graves);
• Notes d’entrevue;
• Implication—Incident (x2) ;
• Notes des AI, des TES, et des AT nos 2, 3, 4 et 5;
• Politique — Matériel et usage de la force;
• Politique — Procédures d’arrestation et comparution devant un tribunal ;
• Rapport de profil de sujet — le plaignant;
• Rapports d’événement supplémentaires de l’AT no 1, du TES no 2 et de six autres agents;
• Dossier de formation sur le recours à la force pour tous les agents désignés;
• Vidéo de l’entrevue avec la TC no 1;
• Mandat de perquisition; et
• Déclaration de témoin des AI nos 1, 2 et 3, et des AT nos 2 et 3.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments suivants obtenus auprès d’autres sources :
• Rapport d’appel d’ambulance des SMU de Hamilton;
• Rapport d’incident des SMU de Hamilton;
• Dossiers médicaux de l’Hôpital général de Hamilton;
• Vidéo de système de surveillance de la rue Main, Hamilton.

Description de l’incident

Les éléments importants de l’incident peuvent être établis clairement grâce aux entretiens avec le plaignant et avec chacun des agents impliqués, ainsi qu’aux vidéos de la détention du plaignant au poste de police qui ont capturé certaines parties de l’incident. Le 24 mars 2021, juste avant 16 h, le SPH a reçu un appel au 9-1-1 de la TC no 1 qui appelait pour signaler que son fils – le plaignant – avait battu son mari à mort. Des agents ont été chargés d’enquêter.

L’AI no 1 est arrivé en premier sur les lieux – un appartement d’un immeuble de la rue Main – suivi de près par l’AT no 3. Le plaignant s’était enfermé dans l’appartement et refusait d’en sortir. Les agents ont tenté d’ouvrir la porte de force et l’AT no 3 est parti chercher un bélier à cette fin. L’AI no 2 et l’AT no 2 ont rejoint l’AI no 1, et ont de nouveau tenté de forcer l’ouverture de la porte. 

Les agents sont parvenus à entrer dans l’appartement et ont confronté le plaignant dans le salon. Quand les agents ont tenté de le menotter, le plaignant a résisté. À un moment donné, le plaignant a tenté de mordre l’AI no 2 qui a réagi en lui assenant un coup de poing à la tête. La lutte s’est poursuivie jusqu’au canapé du salon, où l’AI no 1 a donné deux coups de genou à la cuisse gauche du plaignant. Les agents sont finalement parvenus à menotter le plaignant et l’ont aidé à se relever.

Une fois le plaignant arrêté, l’AI no 2 est allé vérifier l’état du mari de la TC no 1. La TC no 1 avait réussi à sortir de l’appartement peu avant l’arrivée des agents. Son mari était dans une chambre, grièvement blessé.

Le plaignant a été conduit au poste de police.

Après son enregistrement au poste, le plaignant – qui avait réussi à glisser ses bras menottés devant lui – a provoqué une autre altercation physique avec les agents. Alors qu’on l’escortait dans un corridor vers un ascenseur pour le conduire dans une cellule de détention au bureau de la Direction des enquêtes criminelles, le plaignant a refusé d’avancer et a finalement ceinturé les jambes d’un agent qui l’escortait avec les siennes — l’AI no 3. L’AI no 2 est intervenu pour écarter le plaignant de l’AI no 3 et l’a plaqué à terre. Une fois à plat ventre, le plaignant a lutté avec les agents qui essayaient de lui dégager les bras, qu’il maintenait sous son torse. Il a donné des coups de pied, s’est agité dans tous les sens, a craché sur les agents et a tenté de mordre l’AI no 1 et l’AI no 2. L’AI no 3 a averti le plaignant qu’il utiliserait son Taser s’il n’arrêtait pas, puis, comme le plaignant refusait d’obtempérer, a déployé son arme à plusieurs reprises sur lui. Malgré ces décharges, le plaignant a continué de résister. Les agents ont eu recours à une force supplémentaire — un coup de poing à la tête par l’AI no 2 et deux par l’AI no 4, un ou deux coups de pied dans les jambes par l’AT no 5, possiblement un coup de genou possible sur le côté gauche par l’AI no 1 et jusqu’à trois coups de genou du même côté par l’AI no 3. Les agents ont tiré de force sur les bras du plaignant pour les dégager et l’ont menotté dans le dos. Ses jambes ont également été enchaînées.

Le groupe d’agents et le plaignant ont repris leur marche jusqu’au bureau de la DEC, où le plaignant a été logé dans une cellule et où une troisième altercation a eu lieu vers 18 h 15. Cette fois, le plaignant s’est énervé quand des agents sont entrés dans la cellule pour saisir ses vêtements, prélever des échantillons et prendre des photographies. Allongé par terre sur le dos, le plaignant a agité vivement les jambes et donné un coup de pied à l’aine de l’AI no 1. L’agent a réagi en lui donnant un coup de genou à la cuisse gauche. L’AI no 2 lui a aussi donné un coup de genou (à une partie non déterminée du corps). Le plaignant s’est calmé et a permis aux agents spécialistes des sciences judiciaires de terminer leur travail.

Vers 19 h, le plaignant a été transféré de la cellule de détention de la DEC à une autre cellule de l’aire de détention. Quelques heures plus tard, le plaignant s’est plaint de douleurs au côté gauche et des dispositions ont été prises pour l’emmener à l’hôpital.

À l’hôpital, on lui a diagnostiqué une fracture de la main gauche et deux fractures des côtes du côté gauche.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant a reçu un diagnostic de blessures graves à la suite de son arrestation par des agents du SPH le 14 mars 2021. Quatre agents – l’AI no 1, l’AI no 2, l’AI no 3 et l’AI no 4 – ont été désignés en tant qu’agents impliqués aux fins de l’enquête de l’UES. Après avoir évalué les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que ces agents aient commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation et les blessures du plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle lorsqu’ils ont recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, pour autant que cette force n’excède pas ce qui est raisonnablement nécessaire à l’accomplissement d’un acte qui leur est légalement enjoint ou permis de faire. Compte tenu de ce que le service de répartition leur avait dit de l’appel de la TC no 1 au 9-1-1 et de ce que cette dernière avait confirmé directement à l’AI no 1 dans le hall de l’immeuble avant qu’il se rende à l’appartement, les agents avaient des motifs suffisants d’arrêter le plaignant pour voies de fait. Après l’avoir arrêté, les agents avaient également le droit de le maintenir sous leur garde en toute sécurité et de prendre les mesures nécessaires conformément à la loi.

Étant donné la nature et la durée de la résistance physique du plaignant à son arrestation et à son placement sous garde, je ne peux pas raisonnablement conclure que la force exercée contre lui par les agents impliqués était excessive. Dans l’appartement, les agents avaient des raisons de croire que le plaignant venait de commettre une agression brutale et possiblement mortelle. Quand ils ont tenté de le menotter et qu’il s’est débattu, les agents avaient le droit de réagir avec une force décisive pour le placer sous garde le plus rapidement possible. Dans les circonstances, le coup de poing à la tête et le coup de genou à la jambe gauche, assénés respectivement par l’AI no 2 et l’AI no 1, étaient proportionnés à la situation.

Une fois au poste de police, le plaignant est redevenu combatif et les agents ont réagi en ayant recours à une force à mon avis raisonnable. Dans le corridor vers l’ascenseur conduisant au bureau de la DEC, le plaignant a refusé d’avancer, puis a ceinturé l’AI no 3 avec ses jambes, avant d’être plaqué à terre, où il a tenté de mordre les agents, a donné des coups de pied et a refusé de libérer ses bras de sous son torse. À mon avis, le placage à terre par l’AI no 2 était raisonnable pour écarter le plaignant de l’AI no 3. Par la suite, je ne peux pas conclure que la force exercée par les agents dans le cadre d’une lutte intense pour maîtriser le plaignant était sans discernement ou excessive, d’autant plus que plusieurs décharges de pistolet à impulsions s’étaient avérées inefficaces.

Enfin, en ce qui concerne la force utilisée par l’AI no 1 et l’AI no 2 dans la cellule de détention de la DEC, le plaignant venait de donner un coup de pied à l’aine de l’AI no 1 et les agents étaient donc en droit de prendre les mesures nécessaires pour empêcher tout nouvel acte de violence. Dans ces circonstances, je ne peux pas considérer les coups de genou – un par l’AI no 1 et un par l’AI no 2 – comme étant injustifiés. Après les coups, il est révélateur que le plaignant ait dit aux agents qu’il en avait assez de se battre.

Pour les motifs qui précèdent, bien que j’accepte que le plaignant ait subi ses fractures aux côtes au cours d’une ou plusieurs de ses altercations physiques avec la police, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que les agents impliqués se soient conduits de manière illégale au cours de l’arrestation du plaignant et tout au long de sa détention. Il n’y a donc pas lieu de déposer des accusations criminelles dans cette affaire, et le dossier est clos. [3]


Date : 13 juillet 2021

Approuvé par voie électronique par


Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les heures sont dérivées de l’horloge interne du Taser, qui n’est pas nécessairement synchronisée avec l’heure réelle. [Retour au texte]
  • 2) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les éléments importants des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
  • 3) Il est probable que le plaignant ait subi sa fracture de la main gauche au cours de son interaction avec son beau-père avant l’arrivée des agents à son appartement. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.