Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 25-OCI-045
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Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.
En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales
En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
- des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
- des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
- des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
- des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
- des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée
En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- des renseignements qui révèlent des
- des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
- des renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé
En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.
Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.
Exercice du mandat
En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.
Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.
De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.
Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 33 ans (le « plaignant »).
L’enquête
Notification de l’UES[1]
Le 3 février 2025, à 7 h 46, le Service de police de Sarnia (SPS) a communiqué avec l’UES pour lui transmettre l’information suivante.
Le 2 février 2025, à 21 h 43, des agents se sont rendus à une résidence située dans le secteur de la rue Wellington et du chemin Indian en réponse à un appel concernant une introduction par effraction. Lorsque les agents sont arrivés à l’immeuble, ils ont trouvé un homme et une femme au troisième étage. Alors qu’ils s’approchaient, l’homme s’est enfui en descendant un escalier jusqu’au deuxième étage. Un agent a rattrapé l’homme, l’a porté au sol et a procédé à son arrestation. L’homme [on sait maintenant qu’il s’agit du plaignant] s’est plaint de douleur au bras et a été transporté à Bluewater Health, où l’on a déterminé qu’il avait subi une fracture de l’humérus droit. Le plaignant a reçu son congé de l’hôpital et n’a fait l’objet d’aucune accusation.
L’équipe
Date et heure de l’envoi de l’équipe : 3 février 2025 à 8 h 30
Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 3 février 2025 à 9 h 10
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0
Personne concernée (« plaignant ») :
Homme de 33 ans;a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.
Le plaignant a participé à une entrevue le 4 février 2025.
Témoins civils
TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
Les témoins civils ont participé à des entrevues entre le 4 février 2025 et le 5 février 2025.
Agents impliqués
AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué; ses notes ont été reçues et examinées.
Agents témoins
AT no 1 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées
AT no 2 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées
Les agents témoins ont participé à des entrevues le 7 février 2025.
Éléments de preuve
Les lieux
Les événements en question se sont déroulés dans le couloir du deuxième étage d’une résidence située dans le secteur de la rue Wellington et du chemin Indian, à Sarnia, et près de celui-ci.
Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[2]
Enregistrements des communications et rapport du système de répartition assistée par ordinateur
Le 2 février 2025, vers 20 h 43, la TC no 1 appelle le 9-1-1 pour demander à la police de se rendre à une adresse, car trois personnes se trouvent à l’extérieur de son appartement et essaient de déverrouiller les portes. La voisine de la TC no 1 a également remarqué qu’un homme indésirable avait tenté d’entrer dans son appartement. La TC no 1 pense que les trois personnes sont sous l’influence de drogues.
Vers 21 h 35, l’AT no 1 et l’AI sont dépêchés à la résidence, où ils arrivent vers 21 h 43. Les agents fouillent l’immeuble et, vers 21 h 51, l’AI dit qu’un homme le fuit.
Vers 21 h 52, le répartiteur demande où se trouve l’AI, et ce dernier répond qu’il est devant un appartement et qu’il a un homme sous garde. On entend en arrière-plan la voix d’un homme que l’on pense être le plaignant.
Il y a des transmissions inaudibles, mais on entend l’AT no 1 demander l’intervention des services médicaux d’urgence. L’AI demande une vérification du dossier du plaignant.
Documents obtenus du service de police
Sur demande, l’UES a reçu les éléments suivants de la part du SPS entre le 3 et le 18 février 2025 :
- notes et déclaration du témoin – AT no 1;
- notes et déclaration du témoin – AT no 2;
- notes et déclaration du témoin – AI;
- rapport d’arrestation;
- rapport d’incident général;
- enregistrements des communications;
- rapport du système de répartition assistée par ordinateur;
- rapport de mort subite;
- politiques – arrestation et libération des détenus, recours à la force
Éléments obtenus auprès d’autres sources
L’UES a obtenu les dossiers médicaux du plaignant auprès de Bluewater Health le 5 mars 2025.
Description de l’incident
Les éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment une entrevue menée avec le plaignant, permettent d’établir le scénario suivant. L’AI n’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué. Il a toutefois autorisé la divulgation de ses notes.
Dans la soirée du 2 février 2025, l’AI, en compagnie de l’AT no 1, s’est rendu à un immeuble d’habitation situé dans le secteur de la rue Wellington et du chemin Indian, à Sarnia. Une résidente avait contacté la police pour signaler la présence de personnes dans l’immeuble qui tentaient de s’introduire par effraction dans les appartements. Les agents ont repéré et approché deux personnes dans l’escalier. Dès que l’AI a annoncé qu’il était agent de police, l’une des deux personnes s’est enfuie.
La personne qui s’est enfuie est le plaignant. Poursuivi par l’AI, il est entré dans le couloir du troisième étage, a parcouru toute la longueur du couloir et a emprunté un autre escalier. Le plaignant est descendu au deuxième étage, puis est sorti de la cage d’escalier. Il a parcouru une certaine distance dans le couloir, puis a été plaqué par l’AI.
Le plaignant a été arrêté, mais il a été rapidement relâché sans condition lorsqu’on a appris qu’il résidait dans l’immeuble.
Le plaignant a ensuite été transporté à l’hôpital, où l’on a constaté qu’il avait une fracture de l’épaule droite.
Dispositions législatives pertinentes
Paragraphe 25(1), Code criminel – Protection des personnes autorisées
25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier;
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public;
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public;
d) soit en raison de ses fonctions,
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.
Analyse et décision du directeur
Le plaignant a été gravement blessé lors de son arrestation par un agent du SPS le 2 février 2025. L’UES a été avisée de l’incident et a entrepris une enquête, désignant l’AI à titre d’agent impliqué. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir examiné les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle relativement à la blessure du plaignant.
Aux termes du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle pour l’usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit, sur la base d’un jugement raisonnable, nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire.
Je suis convaincu que l’AI exerçait ses fonctions légitimes tout au long de la série d’événements au bout de laquelle il a porté le plaignant au sol. Bien que l’on puisse douter que l’AI avait des raisons d’arrêter le plaignant à ce moment-là, on peut soutenir qu’il y avait des motifs de détention aux fins d’enquête fondés sur des éléments de preuve amenant les agents à soupçonner raisonnablement que le plaignant avait été impliqué dans des activités criminelles : R c. Mann, [2004] 3 RCS 59. Ces éléments de preuve comprenaient l’appel à la police par l’intermédiaire du 9-1-1 concernant des personnes tentant d’entrer par effraction dans des appartements, le fait que le plaignant a été trouvé en train de flâner dans la cage d’escalier avec une autre personne, et sa fuite immédiate lorsque l’AI s’est approché de lui.
Je suis également convaincu que la force utilisée par l’AI pour mettre le plaignant sous garde, soit le fait de le porter au sol, était légitime. Le fait que le plaignant a décidé de fuir la police signifiait qu’une forme d’interdiction physique serait nécessaire. Cela signifiait également que le plaignant était susceptible de résister à son arrestation. Il était logique de porter le plaignant au sol dans ces circonstances, car cela mettait immédiatement fin à la fuite de ce dernier tout en permettant à l’agent de mieux gérer toute résistance persistante de sa part.
Par conséquent, bien que je reconnaisse que le plaignant a subi sa fracture à l’épaule lorsqu’il a été plaqué au sol par l’AI, il n’y a pas de motifs raisonnables de conclure que la blessure a été causée par un acte illégal commis par l’AI. Ainsi, il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.
Date : 22 mai 2025
Approuvé par voie électronique par
Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Notes
- 1) Sauf en cas d’indication contraire, les renseignements contenus dans cette section correspondent à ceux reçus par l’UES au moment où elle a été notifiée et ne correspondent pas nécessairement aux conclusions de l’UES à l’issue de son enquête. [Retour au texte]
- 2) Les enregistrements en question contiennent des renseignements personnels de nature délicate et ne sont donc pas divulgués, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces enregistrements sont résumées ci‑dessous. [Retour au texte]
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.