Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 25-TCD-082
Attention :
Cette page affiche un contenu graphique pouvant choquer, offenser et déranger.
Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. En vertu de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales, les agents sont définis comme des agents de police, des constables spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative.La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.
En vertu de la Loi sur l’Unité des enquêtes spéciales, le directeur de l’UES doit déterminer, sur la base des preuves recueillies au cours d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction criminelle a été commise. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Dans le cas contraire, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation. Si aucune accusation n’est portée, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf dans le cas de rapports concernant des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas rendre public le rapport en tenant compte des intérêts de la personne concernée en matière de protection de la vie privée.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales
En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport. Ces derniers peuvent inclure, sans s’y limiter, les éléments suivants :
- le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
- des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
- des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
- des renseignements qui divulguent des techniques ou des méthodes d’enquête;
- des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
- des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée
En vertu de l’article 14 (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport. Ces renseignements peuvent inclure, sans s’y limiter, les éléments suivants :
- des techniques et des procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
- des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce qu’ils interfèrent avec une question d’application de la loi ou une enquête menée en vue d’une procédure d’application de la loi.
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé. Ces renseignements peuvent inclure, sans s’y limiter, les éléments suivants :
- les noms de personnes, y compris de témoins civils et d’agents impliqués et témoins;
- des renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé
En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.
Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.
Exercice du mandat
En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, constables spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.
Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.
De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.
Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur le décès d’un homme de 53 ans (le « plaignant »).
L’enquête
Notification de l’UES[1]
Le 1er mars 2025, à 7 h 11, le Service de police de Toronto a contacté l’UES avec les renseignements suivants.
Le 28 février 2025, à 23 h 32, des policiers sont intervenus dans une résidence (résidence no 1) située dans le secteur du chemin Ellesmere et du chemin Bellamy Nord, à Scarborough. Une femme qui vivait dans cette résidence (on sait maintenant qu’elle vit dans une autre résidence de la même rue [résidence n° 2]) a appelé la police pour signaler que son père (le plaignant) avait menacé sa mère avec une arme à feu. Le Groupe d’intervention d’urgence du SPT (GIU) est intervenu et a bouclé le périmètre. Les policiers ont tenté d’établir une communication avec le plaignant, sans succès. La police a fait venir un médecin pour tenter de négocier avec le plaignant, toujours en vain. À 6 h 03, le GIU a déployé un drone dans la résidence, qui a permis de localiser une personne décédée — le plaignant. Aucun autre occupant n’a été trouvé à l’intérieur de la résidence.
L’équipe
Date et heure de l’envoi de l’équipe : 1er mars 2025 à 8 h 17
Date et heure de l’intervention de l’UES sur les lieux : 1er mars 2025 à 10 h
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 3
Personne concernée (le « plaignant ») :
Homme de 53 ans, décédé
(Remarque : Une personne concernée [plaignant ou plaignante] est une personne qui, durant une interaction quelconque avec un ou plusieurs agents, a été gravement blessée, est décédée, a signalé qu’elle a été agressée sexuellement ou a été touchée par une arme à feu déchargée par un agent.)
Agent impliqué (AI)
AI A refusé de participer à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué, mais ses notes ont été obtenues et examinées.
(Remarque : Un agent impliqué est un agent ou une agente [agent de police, constable spécial employé par la Commission des parcs du Niagara ou agent de la paix du Service de sécurité de l’Assemblée législative] dont la conduite semble, de l’avis du directeur de l’UES, avoir été la cause de l’incident faisant l’objet de l’enquête.
En vertu de la Loi sur l’UES, les agents impliqués sont invités à participer à une entrevue avec l’UES, mais n’y sont pas légalement obligés, et ils ne sont pas tenus non plus de remettre une copie de leurs notes à l’UES.)
Agents témoins (AT)
AT no 1 a participé à une entrevue; notes obtenues et examinées
AT no 2 a participé à une entrevue; notes obtenues et examinées
AT no 3 a participé à une entrevue; notes obtenues et examinées
AT no 4 a participé à une entrevue; notes obtenues et examinées
AT no 5 a participé à une entrevue; notes obtenues et examinées
AT no 6 a participé à une entrevue; notes obtenues et examinées
AT no 7 n’a pas été interrogé; les notes ont été examinées et l’entrevue a été jugée inutile.
AT no 8 n’a pas été interrogé; les notes ont été examinées et l’entrevue a été jugée inutile.
AT no 9 n’a pas été interrogé; les notes ont été examinées et l’entrevue a été jugée inutile.
Les agents témoins ont été interrogés entre le 3 mars 2025 et le 10 mars 2025.
(Note : Un agent témoin est un agent ou une agente [agent de police, constable spécial de la Commission des parcs du Niagara ou agent de la paix du Service de sécurité de l’Assemblée législative] qui, de l’avis du directeur de l’UES, est en cause dans l’incident faisant l’objet de l’enquête, sans toutefois être un agent impliqué à l’égard de l’incident.
À la demande de l’UES, les agents témoins ont l’obligation légale, en vertu de la Loi sur l’UES, de participer à des entrevues avec les enquêteurs de l’UES et de répondre à toutes leurs questions dans la mesure où elles sont raisonnables. L’UES a également le droit d’obtenir une copie de leurs notes.)
Éléments de preuve
Les lieux
Les faits en question se sont déroulés à l’intérieur et aux alentours d’une maison située dans le quartier du chemin d’Ellesmere et du chemin Bellamy Nord, à Toronto.
Preuves matérielles
Le 1er mars 2025, à 10 h 25, les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES sont arrivés à la résidence n° 2. Un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a été chargé de photographier la scène et un second a scanné la scène afin de produire un dessin à l’échelle. La scène était correctement sécurisée et gardée par des policiers du SPT. Il y avait trois caméras à l’avant de la résidence (côté ouest).
La porte d’entrée présentait des traces d’effraction. Le cadre de la porte était endommagé et le pêne dormant était tordu. La fenêtre latérale à droite de la porte d’entrée avait été cassée.
Dans l’escalier menant à la chambre à coucher située à l’étage se trouvait une copie du mandat de perquisition obtenu par l’agent n° 1. Le plaignant a été retrouvé dans l’une des chambres. La porte de cette pièce ne présentait aucun signe d’effraction. Le défunt gisait sur le dos, au pied du lit. Une mare de sang présumé près du mur laissait supposer que le corps avait été déplacé de cet endroit vers le milieu de la chambre pour permettre l’intervention des Services médicaux d’urgence (SMU), car plusieurs articles et emballages des SMU se trouvaient près du corps.
À proximité, le long du mur de la chambre, se trouvait une commode. Sur celle-ci, un petit revolver chargé était posé. À côté de l’arme, il y avait un sac contenant des munitions de calibre .38, une autre boîte de munitions « Blazer » de calibre .38. Sur une autre commode, dans le coin de la pièce, se trouvait un écran relié aux caméras extérieures. Deux flacons de pilules et deux notes manuscrites étaient également posés sur la commode. Une note similaire a été trouvée sur le sol, près de cette dernière.
À 12 h 56, l’arme à feu trouvée sur la commode de la chambre à coucher a été déclarée sécurisée. Il s’agissait d’un revolver Colt Detective Special de calibre 38.
À 13 h 15, les éléments de preuve étaient identifiés et recueillis.
Témoignages d’experts
Le 2 mars 2025, à 8 h 30, deux enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES et l’enquêteur principal de l’UES se sont rendus à l’Unité provinciale de médecine légale pour l’examen post-mortem du défunt, le plaignant.
À 10 h 04, le pathologiste a terminé l’examen post-mortem et a indiqué que la cause préliminaire du décès était une blessure par balle à la tête.
Preuves vidéo/audio/photographiques[2]
Séquence de la caméra d’intervention
Le 28 février 2025, à 23 h 46, l’agent de patrouille en uniforme — l’agent témoin no 8 — s’est approché de la porte latérale d’une résidence (aujourd’hui connue sous le nom de résidence no 1). Une jeune femme — le témoin civil no 1 — a dit à l’agent témoin no 8 que le plaignant souffrait de troubles mentaux. Ils sont entrés dans la résidence et le témoin civil no 1 a indiqué qu’elle ne savait pas si le plaignant avait été diagnostiqué comme souffrant d’une maladie mentale. Elle a déclaré que le plaignant n’avait pas bu, mais qu’il avait fumé beaucoup de marijuana. À l’intérieur de la résidence se trouvait une femme plus âgée — le témoin civil no 2 — qui s’est présentée comme l’épouse du plaignant. La fille a indiqué que le plaignant était seul à l’intérieur de la résidence et que son père avait un pistolet. Le témoin civil n° 2 a décrit l’arme comme étant un revolver argenté. L’agent témoin no 8 est sorti de la résidence et a annoncé que le plaignant était armé d’un revolver, qu’il avait menacé de tirer sur des policiers, qu’il souffrait d’une maladie mentale inconnue et qu’il avait fumé de la marijuana.
L’agent témoin n° 8 est rentré à nouveau dans la résidence et a demandé au témoin civil n° 2 ce qui s’était passé. Cette dernière était allée porter des documents et son mari l’avait suivie. Le plaignant l’a appelée pour lui demander une pompe à air. À son retour, il a claqué la porte et l’a traitée de « putain de salope ». Il a ensuite pointé une arme sur sa tête et l’a frappée du côté droit au visage. Elle n’a pas perdu connaissance et n’a pas voulu appeler une ambulance. L’agent témoin n° 8 a indiqué que le plaignant se trouvait seul dans la résidence, qu’il était armé et qu’il pouvait être arrêté pour voies de fait, menace et agression armée. Il a décrit le plaignant.
Le 1er mars 2025, vers 6 h 16, l’agent témoin no 3 s’est approché de la porte d’entrée d’une résidence (connue aujourd’hui comme la résidence no 2) et s’est tenu sur le côté gauche de la porte, avec son pistolet dans la main droite, pointé en direction de la porte. Un agent du GIU — l’agent témoin n° 4 — se tenait derrière l’agent témoin n° 3, son fusil C8 prêt à tirer. Au même moment, un autre membre de l’équipe d’intervention a brisé la vitre de la porte, à droite de celle-ci, à l’aide de ce qui semblait être une barre métallique. Les policiers se sont repliés à l’abri d’un véhicule du GIU garé devant la résidence.
À 6 h 21, l’agent témoin no 3 s’est approché de la porte d’entrée avec un bouclier et un pistolet dégainé. À 6 h 22 min 18 s, la porte d’entrée a été forcée par un agent du GIU. L’agent témoin n° 3 a été le premier policier à entrer dans la résidence, suivi de l’agent témoin n° 4 à sa gauche. L’agent témoin n° 3 a monté quatre marches sur le côté droit, qui menaient à une chambre à coucher. L’agent témoin no 3 est entré dans la première chambre à droite, dont la porte était ouverte, suivi par l’agent témoin no 4. L’agent témoin n° 3 s’est penché à gauche de l’entrée et le plaignant a été capturé allongé sur le dos, la tête contre le mur, entre le mur et un lit. L’agent témoin n° 3 a dit « arme à feu » et a ramassé quelque chose (dont on sait aujourd’hui qu’il s’agit d’une arme de poing) près de la main droite du plaignant. L’agent témoin n° 3 a placé l’arme sur le côté. L’agent témoin n° 3 s’est approché et a constaté une blessure à la tempe droite du plaignant. Il y avait une mare de sang sur le sol à côté du côté droit de la tête du plaignant. L’agent témoin n° 3 a pris le pouls du plaignant et a dit : « Il est mort ». L’agent témoin n° 4 a demandé l’intervention d’ambulanciers paramédicaux, et un ambulancier des Services tactiques d’aide médicale d’urgence est arrivé. À 6 h 23 min 26 s, l’agent témoin n° 3 dit qu’il l’a déplacée (l’arme à feu) pour que personne ne bute dessus. Il a ramassé l’arme de poing et l’a placée sur une commode.
Le plaignant a été éloigné du mur et, à 6 h 25, un ambulancier paramédical a demandé à l’agent témoin n° 3 de commencer la réanimation cardiopulmonaire (RCP). Un ambulancier paramédical a appliqué un appareil respiratoire au plaignant et un autre lui a posé des électrodes sur le torse. À 6 h 34 min 20 s, l’agent témoin no 3 a été remplacé par quelqu’un d’autre pour effectuer les compressions thoraciques. À 6 h 34 min 30 s, quelqu’un a demandé à ce que la RCP soit interrompue afin de pouvoir prendre le pouls. Le plaignant a alors été déclaré décédé.
Séquences vidéo – résidence no 2
Des caméras se trouvaient à l’avant de la résidence.
Le 28 février 2025, à 22 h 59, une femme — le témoin civil n° 2 — est entrée par la porte d’entrée de la résidence. Vers 23 h 01, un homme — le plaignant — a ouvert la porte d’entrée et est sorti. Il a jeté quelque chose sur la pelouse enneigée.
À 23 h 04, la porte-moustiquaire s’est ouverte et le témoin civil n° 2 est sorti à reculons et s’est penché. Elle est sortie en courant de la résidence avec son manteau, est montée dans une voiture garée en haut de l’allée et est partie en direction nord-ouest.
À 4 h, un véhicule blindé de dépannage (VBD) du GIU s’est arrêté devant la résidence en direction sud-est. Un projecteur du VBD a été dirigé vers l’avant de la résidence.
À 6 h 16, un deuxième VBD s’est garé à l’arrière du premier VBD. Une équipe de six policiers du GIU s’est approchée de la porte d’entrée et un membre de l’équipe a brisé la fenêtre du côté est de la porte.
À 6 h 17, l’équipe du GIU s’est retirée de la résidence pour se mettre à l’abri derrière le VBD stationné dans la rue.
À 6 h 22, une équipe de six policiers du GIU s’est approchée de la porte d’entrée. La porte a été forcée à l’aide d’un bélier et les membres du GIU sont entrés.
Enregistrements des communications de la police
Le 28 février 2025, à 23 h 26, le témoin civil no 1 a appelé le 911 et a demandé qu’une ambulance se rende à la résidence no 1 pour s’occuper de sa mère, le témoin civil no 2.
À 23 h 30, le témoin civil no 3 a appelé le 911 pour demander à la police de se rendre à la résidence no 2. Elle a expliqué que le témoin civil no 1 l’avait appelée pour lui dire que le père du témoin civil no 1 — le plaignant — avait battu sa mère — le témoin civil no 2. Le plaignant avait cassé une dent à sa mère, l’avait étranglée et avait pointé une arme à feu contre sa tête. Le plaignant avait menacé de se faire du mal et de faire du mal à tout policier qui se présenterait à son domicile. Le plaignant aurait eu des problèmes de consommation d’analgésiques et aurait déjà eu des démêlés avec la police. Le répartiteur a informé le témoin civil no 3 que la police allait intervenir. Le civil no 3 a averti le répartiteur que le plaignant avait déclaré qu’il s’en prendrait aux policiers parce qu’il ne voulait pas aller en prison.
À 23 h 32, le témoin civil no 1 a appelé le 911 pour demander à la police de se rendre à la résidence no 2. Elle a rapporté que son père — le plaignant — avait frappé sa mère au visage et l’avait traînée en montant les escaliers. Il avait une arme à feu et un sac de balles. Le plaignant était seul dans la résidence, et les agents civils n° 2 et n° 1 se trouvaient au bout de la rue, dans une autre résidence (aujourd’hui connue comme étant la résidence n° 1). Le témoin civil no 1 a indiqué au répartiteur où se trouvait son père dans la maison et a fourni une description physique.
À 23 h 38, le répartiteur a alerté l’agent témoin no 7 d’une agression entre partenaires intimes à la résidence no 2. Le répartiteur a transmis l’information reçue lors des appels à la police. Il a été noté que le plaignant avait déclaré qu’il tirerait sur les policiers parce qu’il ne voulait pas aller en prison. Une sergente a demandé à être ajoutée à l’appel.
À 23 h 40, le répartiteur a demandé au GIU de superviser l’appel.
À 23 h 47, l’agent témoin no 7 a signalé que le plaignant était armé d’un petit revolver argenté et qu’il avait menacé de tirer sur les agents de police s’ils intervenaient. Le plaignant était seul dans la résidence et pouvait être arrêté pour voies de fait, agression armée et menaces de mort.
À 23 h 50, la sergente a demandé aux policiers de surveiller l’avant et l’arrière de la résidence no 2, et à l’agent témoin no 7 de rester avec le témoin civil no 2
À 23 h 51, l’agent témoin no 1 du GIU a informé le répartiteur que le GIU était en route. Le témoin civil n° 2 a dit à l’agent témoin n° 7 que le plaignant avait l’arme à feu attachée à sa main avec du ruban adhésif.
À 23 h 53, un agent informe le répartiteur que la résidence est plongée dans l’obscurité et qu’un camion se trouve dans l’allée.
Le 1er mars 2025, à 0 h 01, la sergente a informé le répartiteur que la résidence avait été confinée. Le plaignant aurait tenté d’appeler « notre victime » et, lorsque les policiers ont essayé de lui parler, il aurait raccroché.
À 0 h 03, l’agent témoin no 6 a indiqué qu’un policier du GIU serait affecté comme tireur d’élite près de l’entrée de la résidence. La sergente a alors informé le répartiteur qu’elle avait parlé au GIU et qu’il avait été décidé de maintenir le périmètre de sécurité autour de la résidence jusqu’à l’arrivée du GIU.
À 2 h 05, l’agent témoin no 1 a signalé qu’après des négociations avec le plaignant, celui-ci avait déclaré qu’il ne se trouvait pas dans la résidence, mais chez un ami. Le policier a demandé une localisation d’urgence du téléphone portable du plaignant. Le plaignant était considéré comme suicidaire, armé d’une arme à feu (qu’il avait déjà pointée sur quelqu’un) et dangereux pour lui-même et pour le public.
À 2 h 15, le répartiteur a informé l’agent témoin no 1 que le signal se trouvait à moins de 300 mètres de la résidence.
À 4 h 48, l’agent témoin n° 9 est arrivé sur les lieux.
À 5 h 48, l’équipe de jour du GIU était en route.
À 6 h 02, le répartiteur a signalé qu’une unité de la division 53 amènerait un médecin. Le GIU avait demandé qu’un professionnel de la santé mentale assiste à l’appel.
À 6 h 22, le médecin est arrivé.
À 6 h 33, une ambulance est arrivée.
Éléments obtenus auprès du service de police
Sur demande, l’UES a obtenu les documents suivants du SPT entre le 1er et le 25 mars 2025 :
- Séquence de la caméra d’intervention
- Séquence vidéo de la résidence n° 2
- Enregistrements des communications de la police
- Historique du SPT — Plaignant
- Notes centrales — Agent témoin no 6
- Rapport général d’incident
- Notes — Agents témoins n° 2, n° 4, n° 5, n° 8, n° 7, n° 3, n° 1, n° 9 et celles de l’agent impliqué
- Liste des agents témoins
- Politiques de service du GIU : utilisation de la force, personnes en situation de crise, et arrestation
- Rapport du répartiteur assisté par ordinateur
Éléments obtenus auprès d’autres sources
L’UES a obtenu les documents suivants d’autres sources entre le 2 et le 4 mars 2025 :
- Séquence vidéo de la résidence n° 2
- Rapport sur les résultats préliminaires de l’autopsie du Service de médecine légale de l’Ontario
- Rapport d’appels de l’ambulance des services paramédicaux de Toronto
Description de l’incident
Les preuves recueillies par l’UES, y compris les entrevues avec les témoins de la police et les enregistrements audio et vidéo qui ont capturé l’incident en partie, donnent lieu au scénario suivant. Comme la loi l’y autorise, l’agent impliqué n’a pas accepté d’être interrogé par l’UES. Il a toutefois autorisé la divulgation de ses notes.
Peu après 23 h 30, le 28 février 2025, des agents en uniforme du SPT ont été dépêchés à la résidence no 2 dans le secteur du chemin Ellesmere et du chemin Bellamy Nord. Des appels au 911 avaient été reçus signalant un trouble domestique à la maison dans laquelle le plaignant avait agressé sa femme (le témoin civil no 2) et pointé une arme à feu sur elle, en la menaçant de les tuer tous les deux. Le témoin civil n° 2 avait réussi à s’enfuir de la résidence, et elle et sa fille — le témoin civil n° 1 — se trouvaient ensemble à une autre adresse de la rue. Le plaignant était réputé être seul dans la résidence. Il avait dit au témoin civil no 2 qu’il ne retournerait pas en prison et qu’il était prêt à tirer sur les agents qui interviendraient. Les agents en uniforme ont confiné la résidence en attendant l’arrivée des agents du GIU.
Une équipe d’agents du GIU est arrivée sur les lieux, a établi un centre de commandement non loin de la résidence, et a pris en charge la mise en place du périmètre de sécurité autour de la maison. Sous la supervision de l’agent témoin no 1, l’agent impliqué — un négociateur qualifié — avait la mission de contacter le plaignant. Après plusieurs tentatives infructueuses, l’agent parvient à joindre le plaignant par téléphone vers 1 h 07. Pendant plusieurs heures, l’agent impliqué tente de persuader le plaignant de se rendre pacifiquement à la police. Le plaignant a indiqué qu’il n’avait pas l’intention de blesser qui que ce soit, mais qu’il refusait catégoriquement de retourner en prison. Il a parlé de son éducation difficile, de ses griefs concernant ses relations antérieures avec la police et des problèmes qu’il rencontrait à la maison avec sa femme et son enfant. Il a dit à l’agent impliqué qu’il préférerait se rendre plus tard, mais l’agent lui a indiqué que ce n’était pas possible. Alors que les négociations se poursuivaient, le GIU a demandé conseil auprès d’un psychiatre légiste. Ce dernier a suggéré qu’un message audio soit enregistré par le témoin civil n° 1 et diffusé au plaignant par téléphone. Dans cet enregistrement, le témoin civil no 1 encourageait son père à se rendre pacifiquement et disait que personne ne voulait qu’il soit blessé. Le plaignant a semblé ému par le message, mais n’a pas changé d’avis.
À 5 h 20, le GIU a décidé qu’une attitude plus proactive pourrait s’avérer plus efficace pour débloquer la situation et l’amener vers un dénouement positif, à savoir l’utilisation de gaz dans la résidence afin de forcer le plaignant à se rendre et à sortir de la résidence. L’agent impliqué a informé le plaignant que du gaz pourrait être pulvérisé dans la résidence, mais le plaignant refusait toujours de se rendre. À 5 h 43, on pouvait encore entendre la respiration du plaignant au téléphone, mais il ne parlait plus. La respiration devenant de plus en plus lente et faible, le GIU a décidé de briser une fenêtre afin de déployer un drone. Le drone est entré dans la maison à 6 h 20 et a trouvé le plaignant sur le sol d’une chambre à coucher. Il baignait dans une mare de sang. Les agents du GIU sont entrés dans le domicile et ont constaté l’absence de signes vitaux chez le plaignant. Il avait un revolver dans la main droite et une blessure par balle sur le côté droit de la tête.
Le plaignant a été transporté à l’hôpital et son décès est constaté à 6 h 34.
Cause du décès
Le médecin légiste qui a pratiqué l’autopsie a conclu dans son rapport préliminaire que le décès du plaignant était attribuable à une blessure par balle à la tête.
Dispositions législatives pertinentes
Articles 219 et 220 du Code criminel — Négligence criminelle causant la mort
219 (1) est coupable d’une négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qui est de son devoir d’accomplir,
montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.
220 Quiconque, par négligence criminelle, cause la mort d’une autre personne est coupable d’un acte criminel passible :
a) s’il y a usage d’une arme à feu lors de la perpétration de l’infraction, de l’emprisonnement à perpétuité, la peine minimale étant de quatre ans;
b) dans les autres cas, de l’emprisonnement à perpétuité.
Analyse et décision du directeur
Le plaignant est décédé d’une blessure par balle qu’il s’est lui-même infligée dans la matinée du 1er mars 2025. Comme il se trouvait à son domicile et que des agents du SPT encerclaient la résidence à ce moment-là, l’UES a été informée de l’incident et a ouvert une enquête. L’AI a été identifié comme étant l’agent impliqué. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des preuves, il n’y a aucune raison de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en rapport avec le décès du plaignant.
L’infraction à prendre en considération est la négligence criminelle entraînant la mort, conformément à l’article 220 du Code criminel. Cette infraction est réservée aux cas graves de négligence qui démontrent une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui. Elle est fondée, en partie, sur une conduite qui constitue un écart marqué et substantiel par rapport au niveau de diligence qu’une personne raisonnable aurait exercé dans les circonstances. Dans le cas présent, la question est de savoir si l’AI a fait preuve d’un manque de diligence suffisamment flagrant pour entraîner une peine criminelle, ayant causé ou contribué à la mort du plaignant. À mon avis, ce n’est pas le cas.
Les agents qui sont intervenus sur les lieux de l’incident étaient à leur poste légitime et dans l’exercice de leurs fonctions tout au long des événements qui ont abouti au décès du plaignant. Le plaignant devait être arrêté pour avoir agressé le témoin civil n° 2. Compte tenu des renseignements selon lesquels le plaignant était en possession d’une arme à feu, il était également impératif, dans l’intérêt de la sécurité publique, qu’il soit placé en garde à vue dès que les circonstances l’auraient permise.
Je suis également convaincu que l’opération du GIU à l’extérieur du domicile, et notamment la place de l’AI dans cette opération en tant que négociateur en chef, a été menée avec le plus grand soin et en tenant compte de la sécurité publique, y compris de la santé et du bien-être du plaignant. Les négociations avaient toutes les chances d’aboutir et, compte tenu de la relation que l’AI avait établie avec le plaignant, il semblait qu’une résolution pacifique était envisageable. Le projet consistant à envoyer du gaz dans le domicile constituait une escalade dans la tactique policière, mais celle-ci était proportionnée à l’urgence de la situation. Bien que le plaignant n’ait pas pu être persuadé de se rendre par la seule voie de la négociation, il était cohérent dans ses communications avec l’AI et il y avait une possibilité que la menace du gaz le convainque de sortir. Enfin, dès qu’il est apparu que l’état du plaignant s’était aggravé, le GIU a agi rapidement pour entrer dans le domicile et lui porter toute l’aide possible. Au vu de ce dossier, il ne serait pas raisonnable de conclure que l’AI ou tout autre agent impliqué a dépassé les limites de la diligence prescrite par le droit criminel en ce qui concerne le décès du plaignant.
Pour les raisons susmentionnées, il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.
Date : 23 juin 2025
Approuvé par voie électronique par
Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Notes
- 1) Sauf indication contraire, les renseignements contenus dans cette section reflètent les renseignements reçus par l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les conclusions de fait de l’UES à l’issue de son enquête. [Retour au texte]
- 2) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels sensibles et ne sont pas divulgués en vertu de l’article 34(2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces documents sont résumées ci-dessous. [Retour au texte]
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.