Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 25-PCI-077
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Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.
En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales
En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
- des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
- des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
- des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
- des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
- des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée
En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- des renseignements qui révèlent des
- des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
- des renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé
En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.
Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.
Exercice du mandat
En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.
Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.
De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.
Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 40 ans (le « plaignant »).
L’enquête
Notification de l’UES[1]
Le 24 février 2025, à 11 h 32, la Police provinciale de l’Ontario (la Police provinciale) (région de l’Ouest) a communiqué avec l’UES pour lui transmettre l’information suivante.
Le 23 février 2025, vers 17 h 27, des agents du Détachement du comté de Wellington de la Police provinciale ont répondu à un appel concernant une querelle de ménage à une résidence de Palmerston. L’appelante a signalé que son ex-partenaire, le plaignant, l’a agressée et a endommagé ses biens. Les agents ont trouvé le plaignant, qui a quitté les lieux à pied avant l’arrivée de la police, à une courte distance de la résidence. Lorsque les agents ont dit au plaignant qu’il était en état d’arrestation, il a résisté et a été porté au sol. Le plaignant a été emmené au poste du Détachement de Teviotdale de la Police provinciale et a été placé dans une cellule en attendant une enquête sur le cautionnement. Il ne s’est pas plaint d’une blessure pendant le processus de mise en détention. Le 24 février 2025, à 7 h 34, le plaignant s’est plaint d’une douleur à l’abdomen. Les services médicaux d’urgence se sont rendus au poste du détachement et ont transporté le plaignant au North Wellington Health Care – Hôpital de Palmerston et du district, où l’on a constaté qu’il avait une côte fracturée. Le plaignant a été confié de nouveau à la garde de la Police provinciale et ramené au poste pour une enquête sur le cautionnement.
L’équipe
Date et heure de l’envoi de l’équipe : 24 février 2025 à 12 h 59
Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 24 février 2025 à 14 h 49
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0
Personne concernée (« plaignant ») :
Homme de 40 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés
Le plaignant a participé à une entrevue le 4 mars 2025.
Agent impliqué (AI)
AI no 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.
Agents témoins
AT no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 3 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 4 Notes examinées ; entrevue jugée non nécessaire
Les agents témoins ont participé à des entrevues le 11 mars 2025.
Éléments de preuve
Les lieux
Les événements en question se sont déroulés dans un parc situé au sud de la rue Main, à son intersection avec la rue Norman, à Palmerston, et dans les environs de ce parc.
Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[2]
Enregistrements des communications et rapport du système de répartition assistée par ordinateur
Le 23 février 2025, à 17 h 26, un homme communique avec la Police provinciale parce que sa voisine s’est présentée à sa porte. Elle lui a demandé d’appeler la police, car le plaignant est entré de force chez elle. Il donne son adresse, qui est située à Palmerston.
À 17 h 28, on transmet par la radio de police de l’information concernant un incident violent au domicile d’une femme. L’AT no 3 dit qu’il connaît l’adresse. Selon d’autres renseignements, une femme très effrayée aurait couru jusque chez un voisin pour lui demander d’appeler la police. L’AT no 1, l’AT no 2, et l’AI affirment avoir bien entendu l’appel de service.
À 17 h 37, l’AT no 3 arrive dans le secteur, immédiatement suivi par l’AT no 1 et l’AT no 2. La femme est retournée à son domicile. L’AT no 1 indique que l’homme, le plaignant, était revenu chercher son téléphone, mais qu’il est reparti. Une vérification du dossier de police révèle que le plaignant est violent, en probation et connu de la police.
À 17 h 50, l’AT no 1 dit par la radio que le plaignant a été arrêté. L’AI répète l’information. L’AT no 3 confirme une accusation de méfait.
À 18 h 5, l’AT no 1 et l’AT no 2 emmènent le plaignant au poste du Détachement de Teviotdale de la Police provinciale.
Documents obtenus du service de police
Sur demande, l’UES a obtenu les éléments suivants de la part de la Police provinciale entre le 24 février 2025 et le 11 mars 2025 :
- rapport d’incident général;
- résumé du rapport du système de répartition assistée par ordinateur;
- rapport d’arrestation;
- rapport sommaire sur les accusations portées;
- rapport des agents concernés;
- dossier de détention;
- enregistrements des communications;
- enregistrements des caméras à bord des véhicules;
- photographies des lieux;
- notes de l’AT no 1, l’AT no 2, l’AT no 3 et l’AT no 4
Éléments obtenus auprès d’autres sources
L’UES a obtenu les dossiers médicaux du plaignant de l’Hôpital de Palmerston et du district le 5 mars 2025.
Description de l’incident
Les éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment les entrevues menées auprès du plaignant et des témoins de la police, permettent d’établir le scénario suivant. L’AI n’a pas consenti à se soumettre à une entrevue avec l’UES ni à ce qu’on remette ses notes, comme la loi l’y autorise.
Le 23 février 2025, en fin d’après-midi, des agents ont été dépêchés à une adresse à Palmerston pour une querelle de ménage. Un appelant avait communiqué avec le 9-1-1 pour signaler qu’un homme était entré de force dans le domicile d’une femme. Lorsque les agents sont arrivés sur les lieux, ils ont constaté que l’homme était parti. Ils ont parlé à la femme et se sont assurés qu’il y avait des motifs d’arrêter l’homme pour méfait en rapport avec les biens qu’il avait endommagés à la résidence.
L’homme était le plaignant. Il se trouvait à une courte distance de la résidence de la femme lorsqu’il a été confronté par plusieurs agents de la Police provinciale, dont l’AI, dans un parc. Il s’en est suivi une altercation physique entre le plaignant et les agents, au cours de laquelle le plaignant a subi une fracture à une côte.
Le plaignant a été transporté à un poste de la Police provinciale après son arrestation. Il a ensuite été transporté à l’hôpital, où l’on a constaté sa blessure.
Dispositions législatives pertinentes
Paragraphe 25(1), Code criminel – Protection des personnes autorisées
25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier;
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public;
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public;
d) soit en raison de ses fonctions,
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.
Article 430, Code criminel – Méfait
430 (1) Commet un méfait quiconque volontairement, selon le cas :
a) détruit ou détériore un bien;
b) rend un bien dangereux, inutile, inopérant ou inefficace;
c) empêche, interrompt ou gêne l’emploi, la jouissance ou l’exploitation légitime d’un bien;
d) empêche, interrompt ou gêne une personne dans l’emploi, la jouissance ou l’exploitation légitime d’un bien.
Analyse et décision du directeur
Le plaignant a subi une blessure grave lors de son arrestation par des agents de la Police provinciale à Palmerston le 23 février 2025. L’UES a été avisée de l’incident et a entrepris une enquête, désignant l’AI à titre d’agent impliqué. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir examiné les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle relativement à l’arrestation et à la blessure du plaignant.
Aux termes du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle pour l’usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit, sur la base d’un jugement raisonnable, nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire.
Selon l’information transmise à la police par l’intermédiaire de l’appel au 9-1-1 et les questions posées par les agents sur place concernant les biens endommagés, je suis convaincu que les agents étaient en droit de chercher à arrêter le plaignant pour méfait, aux termes de l’article 430 du Code criminel.
Je suis également convaincu que les éléments de preuve ne permettent pas de conclure, sur la base d’un jugement raisonnable, que la force employée par les agents pendant l’arrestation du plaignant n’était pas légitime. Dans l’une des versions des faits qui ont été rapportées, plusieurs agents auraient porté le plaignant au sol dans le parc, puis lui auraient donné des coups de poing à la tête et des coups de pied aux côtes, et que le plaignant aurait peu résisté. D’un autre côté, l’AT no 1 et l’AT no 2, qui ont participé à l’arrestation avec l’AI, affirment que le plaignant a adopté une attitude agressive envers les agents dès le début et qu’il a refusé de tendre les bras pour être menotté lorsqu’il était au sol. Selon l’AT no 1, après une brève lutte au sol, l’AI a donné un coup de poing dans les côtes du plaignant, après quoi l’agent a pu prendre le contrôle de son bras droit et le placer derrière son dos. Selon cette description des événements, cet unique coup, donné pour maîtriser le plaignant qui résistait et procéder à son arrestation, ne semble pas constituer un usage disproportionné de la force. Comme il n’y a aucune raison de croire que la première version des événements est plus proche de la vérité que les preuves fournies par les agents, je ne peux pas conclure, sur la base d’un jugement raisonnable, que la force utilisée par l’AI n’était pas légitime.
En conclusion, même si je reconnais que la fracture du plaignant a été causée par la force employée par l’AI, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’elle est attribuable à une conduite illégale de la part de l’agent. Ainsi, il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.
Date : 20 juin 2025
Approuvé par voie électronique par
Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Notes
- 1) Sauf en cas d’indication contraire, les renseignements contenus dans cette section correspondent à ceux reçus par l’UES au moment où elle a été notifiée et ne correspondent pas nécessairement aux conclusions de l’UES à l’issue de son enquête. [Retour au texte]
- 2) Les enregistrements en question contiennent des renseignements personnels de nature délicate et ne sont donc pas divulgués, aux termes du paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces enregistrements sont résumées ci-dessous. [Retour au texte]
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.