Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 25-TCD-246

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • des renseignements qui révèlent des
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
  • des renseignements sur le lieu de l’incident;
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant le décès d’un homme de 46 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES[1]

Le mardi 17 juin 2025, à 4 h 30, le Service de police de Toronto (SPT) a communiqué avec l’UES pour lui transmettre l’information suivante.

Le 17 juin 2025, à 1 h 56, des agents de police ont été appelés à se rendre à un appartement situé dans le secteur de la rue Church et de l’Esplanade, à Toronto, car une personne était en situation de crise. Le plaignant avait communiqué avec le SPT pour signaler qu’il pensait qu’un cadavre était dissimulé dans son appartement. La TC no 1 se trouvait également dans l’appartement. Celle-ci a tenté de réconforter le plaignant pendant qu’il parlait avec les répartiteurs de la police. Le plaignant a quitté son appartement. Selon ce qui a été rapporté, il serait allé frapper aux portes des voisins, ce qui a donné lieu à d’autres appels au SPT au sujet de son comportement. Alors que les agents de police arrivaient sur les lieux, le plaignant est retourné dans son appartement, accompagné de la TC no 1. Vers 2 h 27, des agents de police ont forcé la porte à la suite de cris provenant de l’intérieur de l’appartement. À l’intérieur de l’appartement, le plaignant brisait du verre et se déplaçait vers le balcon, puis revenait sur ses pas [on sait maintenant qu’il se trouvait dans une chambre à coucher]. À 2 h 43, après avoir jeté du verre depuis le balcon et être retourné à l’intérieur de l’appartement, il a été soumis au déploiement d’une arme à impulsions, qui n’a pas donné les résultats escomptés. Il est retourné sur le balcon, alors que les agents de police tentaient de le ramener dans l’appartement. À 2 h 51, selon ce qui a été rapporté, le plaignant serait tombé au sol depuis le balcon. Les ambulanciers des services médicaux d’urgence de Toronto ont été appelés sur les lieux. Le plaignant a été transporté à l’Hôpital St. Michael, où il a succombé à ses blessures et l’on a constaté son décès.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 17 juin 2025, à 4 h 50

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 17 juin 2025, à 7 h 20

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 2

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 46 ans; décédé

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

TC no 3 A participé à une entrevue

TC no 4 A participé à une entrevue

TC no 5 A participé à une entrevue

TC no 6 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à des entrevues entre le 18 juin 2025 et le 15 juillet 2025.

Agents impliqués (AI)

AI no 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

AI no 2 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 3 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 4 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 5 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 6 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 7 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

Les agents témoins ont participé à des entrevues les 26 et 27 juin 2025.

Éléments de preuve

Les lieux

Les événements en question se sont déroulés sur le balcon d’une chambre dans un appartement situé dans le secteur de la rue Church et de l’Esplanade, à Toronto, et dans les environs.

Éléments de preuve matériels

Le 17 juin 2025, vers 7 h 20, le service des sciences judiciaires de l’UES est arrivé à un appartement situé dans le secteur de la rue Church et de l’Esplanade, à Toronto, en réponse à un décès qui s’est produit alors que la personne en question était sous garde. Le temps était clair et chaud, et il y avait peu de vent. Les lieux où les faits en question se sont déroulés se trouvaient dans un immeuble résidentiel de plusieurs étages. Le plaignant avait atterri sur un trottoir en béton situé juste en dessous de l’appartement.

Des objets ont été photographiés et recueillis près de la zone où le plaignant a atterri, notamment trois sondes d’arme à impulsions. Il y avait également plusieurs taches de sang, dont on a prélevé un échantillon avec un écouvillon. On a également recueilli un briquet, une tête et un manche de marteau cassés, une petite bouteille de désinfectant pour les mains, une boîte de téléphone Samsung, un insecticide en aérosol, divers articles de toilette, deux chaussures et trois billets de 5 dollars.

En entrant dans le bâtiment, on a vu plusieurs gouttelettes de sang sur le sol de l’ascenseur. On a prélevé un échantillon et photographié la zone.

Dans le couloir menant à l’appartement du plaignant, il y avait des gouttelettes de sang à l’extérieur de l’ascenseur, lesquelles formaient une traînée menant à l’appartement du plaignant. Des traces de sang étaient visibles sur la porte de l’appartement et sur sa poignée.

On a examiné l’intérieur de l’appartement.

Dans la chambre, il y avait une fenêtre brisée sur laquelle on a vu des éclats de verre et des taches de sang. Cette fenêtre mesurait 66 centimètres (cm) de hauteur et 42 cm de largeur. On a vu des flaques de sang sur le sol, à l’est de la fenêtre. Il y avait également un petit balcon (margelle) de 96 cm de longueur et de 48 cm de largeur, de même qu’un mur de 25 cm de largeur et de 35 cm de hauteur. Le sol du balcon était taché de sang. Deux sondes d’arme à impulsions ont été recueillies sur le balcon. Un T-shirt noir était accroché au mur avec une sonde d’arme à impulsions, et l’on a trouvé deux autres sondes sur place. Tous les éléments de preuve et l’appartement ont été photographiés.

De plus, on a photographié les dommages et le sang vus à l’extérieur de la fenêtre de la chambre de l’appartement qui se trouvait sous les lieux de l’incident[2].

À 11 h 45, on a photographié le plaignant à l’Hôpital St. Michael. Une vignette pour éléments de preuve de l’UES a été attachée au sac mortuaire et, à 13 h, le corps a été transporté au Bureau du coroner pour une autopsie.

Éléments de preuves médicolégaux

Données sur le déploiement de l’arme à impulsions de l’AT no 1 (déployée par l’AI no 1)

Le 17 juin 2025, à 2 h 46 min 2 s[3], la gâchette a été actionnée, la cartouche dans le compartiment no 1 a été déployée, et il y a eu une décharge électrique pendant 0,628 seconde. À 2 h 46 min 3 s, la gâchette a été actionnée, la cartouche dans le compartiment no 2 a été déployée, et il y a eu une décharge électrique pendant 13,056 secondes. À 2 h 46 min 17 s, le bouton d’arc droit a été enfoncé, et il y a eu une décharge électrique pendant 13,623 secondes.

Données sur le déploiement de l’arme à impulsions de l’AI no 1 (déployée par l’AI no 2)

Le 17 juin 2025, à 2 h 46 min 44 s, la gâchette a été actionnée, la cartouche dans le compartiment no 1 a été déployée, et il y a eu une décharge électrique.

À 2 h 46 min 45 s, la gâchette a été actionnée, et il y a eu une décharge électrique pendant 4,993 secondes.

À 2 h 47 min 2 s, le bouton d’arc gauche a été enfoncé, et il y a eu une décharge électrique pendant 5,072 secondes.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[4]

Enregistrements des caméras d’intervention

Le 17 juin 2025, vers 2 h 5, on voit l’AT no 2 et l’AI no 2 debout devant une porte [on sait maintenant qu’il s’agit de la porte de l’appartement du plaignant, dans le secteur de la rue Church et de l’Esplanade, à Toronto]. L’AI no 2 frappe à la porte et annonce « SPT ». Un homme [on sait maintenant qu’il s’agit du plaignant] crie immédiatement « Ils essaient de me tuer ». Le plaignant frappe la porte depuis l’intérieur. On entend une femme [on sait maintenant qu’il s’agit de la TC no 1] depuis l’intérieur de l’appartement. L’AT no 2 annonce que les agents veulent vérifier que tout le monde va bien. La TC no 1 dit : « Donne-moi le marteau ».

Vers 2 h 7, l’AI no 1 et l’AT no 4 arrivent sur place, suivis de l’AT no 3 et de l’AT no 1. Le bruit des coups se poursuit. Les agents de police n’arrivent pas à ouvrir la porte. Le plaignant répète : « Ils essaient de me tuer ». L’AI no 1 tente d’ouvrir la porte à coups de pied.

Vers 2 h 15, une substance est pulvérisée depuis l’intérieur de l’appartement. L’AT no 2 demande une option de recours à la force non létale.

Vers 2 h 18, le plaignant crie à plusieurs reprises : « Au feu, au feu ».

Vers 2 h 27, l’AI no 1 et l’AT no 2 discutent du fait que le déploiement d’une arme à impulsions est la meilleure option.

Vers 2 h 28, l’AT no 7 et un pompier du Service des incendies de Toronto arrivent sur les lieux. Le pompier utilise un pied-de-biche pour tenter de briser le mécanisme de verrouillage de la porte. Le plaignant demande à être laissé seul et dit à la TC no 1 qu’il va sauter du balcon. On apprend que le plaignant se trouve sur le rebord d’un balcon et qu’il s’apprête à sauter. Tout le monde arrête ce qu’il fait. L’AT no 2 s’adresse à la TC no 1 et lui demande d’essayer de convaincre le plaignant de revenir dans l’appartement. La TC no 1 revient et signale que le plaignant est toujours sur le rebord et qu’il menace de sauter.

Vers 2 h 35, l’AT no 7 quitte les lieux.

Vers 2 h 36, un agent de sécurité apporte un passe-partout. La TC no 1 indique que le plaignant est toujours sur le rebord et qu’il a jeté son téléphone par la fenêtre.

Vers 2 h 37, l’AT no 2 demande à la TC no 1 d’ouvrir la porte, ce qu’elle a fait, et les agents entrent. La TC no 1 déclare que le plaignant a une jambe par-dessus le rebord. L’AI no 1 parle d’agripper le plaignant par surprise, si l’occasion se présente. L’objectif était de le tirer à l’intérieur.

Vers 2 h 39, la TC no 1 indique que le plaignant veut se rendre à l’hôpital.

Vers 2 h 40, l’AT no 2 s’enquiert de l’heure d’arrivée des services médicaux d’urgence. La TC no 1 indique que le plaignant a fumé de la marijuana et a pris des somnifères.

Vers 2 h 41, la TC no 1 déclare que le plaignant sautera si les agents s’approchent de lui. L’AT no 2 assure à la TC no 1 qu’ils emmèneront le plaignant à l’hôpital. L’AT no 2 demande à la TC no 1 de retourner voir le plaignant et de lui dire que l’ambulance est en route.

Vers 2 h 44, l’AT no 3 se trouve au niveau du sol. On voit le plaignant briser le verre de la fenêtre et le jeter sur le sol, en dessous. L’AT no 2 reçoit un appel téléphonique, et on l’entend demander où se trouve le plaignant et s’il risque de tomber en cas d’utilisation d’une arme à impulsions. Les agents discutent des enjeux de sécurité liés au déploiement d’armes à impulsions sur le plaignant, à savoir le risque qu’il passe par-dessus le rebord. On mentionne que la situation nécessite une intervention immédiate, car l’AT no 2 a appris que le plaignant s’est coupé le poignet avec du verre et qu’il a un pied par-dessus le rebord. L’AT no 2 s’adresse à un agent au niveau du sol et attend qu’on lui dise que le plaignant est descendu du rebord et qu’il s’est rapproché du côté du bâtiment.

Vers 2 h 46, l’AT no 2 dit « Allez-y ». L’AI no 1 entre dans la chambre en premier, suivi de l’AT no 1 et de l’AI no 2. L’AI no 1 et l’AT no 1 ont leur arme à impulsions à la main. Le plaignant crie. La vitre droite est brisée, et l’on voit le plaignant sur le côté gauche, sur la margelle. Les agents déposent leurs armes à impulsions sur le rebord de la fenêtre de la chambre et tendent les bras à travers la vitre brisée à leur droite pour agripper le plaignant. L’AI no 1 et l’AT no 1 se trouvent dans la fenêtre et l’AI no 2 est derrière l’AI no 1. À 2 h 46 min 21 s, l’AI no 1 ramasse l’arme à impulsions de l’AT no 1 et l’AI no 2 se déplace vers le côté gauche de la fenêtre, puis ramasse l’arme à impulsions de l’AI no 1. Le plaignant dit : « J’entre ». L’AI no 1 et l’AT no 1 tirent sur le bras du plaignant et lui disent : « Viens ici ». Le plaignant crie : « À l’aide, ils vont me tirer dessus ». On dit au plaignant qu’on ne veut pas lui faire de mal. L’AI no 1 se suspend à la fenêtre pour maintenir sa prise à deux mains sur le bras droit du plaignant. L’AT no 1 dit au plaignant : « Ne fais pas ça, mon gars, ne fais pas ça ». L’AI no 1 pointe son arme à impulsions sur le plaignant, par-dessus l’AT no 1.

Vers 2 h 46 min 26 s, on entend le crépitement du déploiement d’une arme à impulsions et, à 2 h 46 min 28 s, quelqu’un annonce : « Taser, Taser, Taser ». L’AI no 2 se trouve à gauche de la fenêtre. L’AT no 1 se trouve à droite de l’AI no 2, et le bras de l’AI no 1 est par-dessus l’épaule droite de l’AT no 1. On entend toujours le crépitement de l’arme à impulsions.

Vers 2 h 46 min 37 s, l’AI no 2, qui tient l’arme à impulsions de l’AI no 1 dans sa main droite, brise la fenêtre du côté gauche. On voit le plaignant allongé sous la fenêtre, et l’on voit également ses chaussures de sport donner des coups de pied vers la fenêtre.

Vers 2 h 46 min 38 s, l’AI no 1 annonce « Double déploiement », tout en repoussant l’AT no 1 de la fenêtre. Le plaignant dit « D’accord, d’accord ». Avec son bras droit, l’AI no1 tend son arme à impulsions vers la fenêtre. L’AI no 2 se tient du côté gauche de la fenêtre et l’AT no 1 se trouve entre l’AI no 1 et l’AI no 2. L’AI no 2 replace l’arme à impulsions de l’AI no 1 sur le rebord de la fenêtre, puis il essaie d’agripper le plaignant.

Vers 2 h 46 min 44 s, le plaignant s’assoit entre la fenêtre et le rebord, le dos tourné au mur du balcon. Un agent tend les bras à travers la fenêtre gauche pour agripper le plaignant.

Vers 2 h 46 min 46 s, quelqu’un crie : « Tirez encore avec le Taser ». L’AI no 1 déploie son arme à impulsions en direction du plaignant, qui crie « Non ». Le plaignant retire les fils et les sondes de l’arme à impulsions de l’avant de son torse. On saisit le plaignant par l’épaule gauche, alors qu’il se relève et commence à grimper par-dessus le rebord. On voit l’AI no 1 et l’AI no 2 agripper le bras droit du plaignant pour l’empêcher de passer par-dessus. Les agents disent : « Non, non, non, non ». Le plaignant continue de s’éloigner pour se dégager de leur prise.

Vers 2 h 46 min 58 s, l’AT no 2 crie qu’il a une courroie noire et dit : « Peut-on l’attacher? ». Quelqu’un crie : « Il glisse ». Au travers du verre brisé, l’AI no 2 et l’AI no 1 s’accrochent au plaignant pour l’empêcher de passer par-dessus le rebord.

Vers 2 h 47 min 15 s, l’AT no 2 remet la courroie noire à l’AI no 2, et ce dernier dit que le plaignant est hors de sa portée. L’AI no 1 dit : « Viens ici, ne fais pas ça ». L’AI no 1 déclare qu’il s’est coupé et demande où se trouve le plaignant. On entend quelqu’un répondre : « En dessous ». Le plaignant crie : « Ils essayaient de me tirer dessus ». L’AI no 1 recule et l’AI no 2 tient une courroie noire dans sa main. L’AI no 1 quitte l’appartement pendant que l’AT no 2 essaie d’arrêter le saignement sur son bras droit. L’AI no 2 a des coupures au bras droit et rencontre l’AT no 7 près de l’ascenseur.

Vidéo captée à l’aide d’un téléphone cellulaire – TC no 2

La vidéo commence le 17 juin 2025. On se trouve dans un immeuble résidentiel situé de l’autre côté de la rue où se déroulent les faits en question. La vidéo n’affiche pas la date ni l’heure.

Trois véhicules de police aux couleurs du SPT et un camion de pompiers sont garés devant un immeuble résidentiel. La caméra se détourne et montre le haut de l’immeuble, tandis qu’une couverture bleue tombe sur le sol. Des lampes de poche au niveau de la rue éclairent un homme, soit le plaignant, perché sur le rebord d’une fenêtre, alors qu’il retire des éclats de verre d’une fenêtre brisée et les jette dans la rue. Le plaignant semble communiquer avec quelqu’un qui se trouve au niveau de la rue [on sait maintenant qu’il s’agit de l’AT no 3], mais ce qu’il dit est indiscernable.

Environ 1 min 29 s après le début de la vidéo, on entend des agents de police crier depuis la fenêtre où se trouve le plaignant. Un agent tend les bras par la fenêtre et agrippe les mains du plaignant, mais ce dernier les retire. Le plaignant se baisse et s’assoit dans la margelle, puis continue de lutter contre les agents. La deuxième vitre se brise alors qu’un autre agent tend les bras pour essayer d’aider à tirer le plaignant à l’intérieur de l’appartement.

Vers 1 min 45 s, on voit une main tenant une arme à impulsions à la fenêtre, puis l’arme est déployée en direction du plaignant. On entend un premier bruit sec, suivi d’un second, alors qu’une deuxième fenêtre vole en éclats. On voit des mains sortir par la deuxième fenêtre. Le plaignant se met sur le dos et donne des coups de pied vers le haut, où se trouvent les mains des agents. Un agent tient le poignet droit du plaignant alors que celui-ci se met sur ses pieds et passe une jambe par-dessus le rebord de la margelle. Le plaignant retire son bras de la prise de l’agent et s’abaisse.

Vers 2 min 25 s, le plaignant enlève son chandail à capuchon, se déplace vers le nord le long du rebord de l’étage inférieur et utilise son pied gauche pour frapper une fenêtre.

Vers 3 min 12 s, les agents quittent la zone de la fenêtre. Le plaignant tourne le dos à la fenêtre et se sert de ses bras tendus pour se stabiliser dans le cadre de la fenêtre. Il abaisse ensuite sa jambe gauche sous le rebord de la fenêtre. Il semble vouloir passer à la fenêtre suivante, mais il glisse et tombe du rebord de la fenêtre, les pieds en premier. Le plaignant tombe entre les branches d’un arbre, puis on entend un bruit sourd.

Vidéo captée à l’aide d’un téléphone cellulaire – Utilisateur anonyme de TikTok

La vidéo n’affiche pas la date ni l’heure.

On voit le plaignant debout sur un rebord à l’extérieur d’une fenêtre. Environ 0 min 11 s après le début de la vidéo, il jette une couverture vers le bas, dans la rue. La caméra se détourne du bâtiment et l’on voit un camion de pompiers faire marche arrière vers le sud, dans la rue devant le bâtiment. Une lampe de poche éclaire la zone du bâtiment où se trouve le plaignant.

Vers 0 min 19 s, il y a une coupure dans la séquence, qui reprend plus tard. Une personne dit : « C’était un Taser, ils lui ont tiré dessus avec une arme à impulsions ». On entend un crépitement et l’on voit le plaignant couché sur le dos, sur la margelle, alors qu’il donne des coups de pied vers le haut.

Vers 0 min 40 s, une main sort de la fenêtre en direction du plaignant, qui se met debout et passe sa jambe gauche par-dessus le rebord de la margelle. Le plaignant penche le haut de son corps vers l’avant sur le rebord, alors que le mouvement de son bras droit est entravé. Une personne dit : « Ne fais pas ça! ». Le plaignant passe une jambe par-dessus le rebord de la margelle. Il grimpe par-dessus, et ses jambes pendent tandis qu’il agrippe le rebord à deux mains. La tête d’un agent de police émerge de la fenêtre, alors que le plaignant se débat pour enlever son chandail à capuchon. Il réussit à poser ses pieds sur le rebord de la fenêtre de l’appartement du dessous et se libère de son chandail à capuchon.

Vers 1 m et 29 s, le plaignant se tient dos à la fenêtre d’un appartement situé en dessous. Il se tourne face à la fenêtre et, à 1 min 42 s, il tombe du rebord de la fenêtre.

Vers 1 m et 54 s, il y a une coupure dans la séquence, qui reprend plus tard. On voit des agents de police, qui entourent le plaignant, alors qu’il est couché sur le dos. Les mains du plaignant sont menottées devant lui.

Vidéo captée à l’aide d’un téléphone cellulaire – TC no 6

La vidéo, qui consiste en deux enregistrements, n’affiche pas la date ni l’heure.

Environ 0 min 13 s après le début de la vidéo, on voit le plaignant essayer de grimper pour sortir par une fenêtre. Sa jambe gauche pend à l’extérieur de la fenêtre et son dos est tourné vers le sol. Alors qu’il essaie toujours de sortir, son bras droit est ramené à l’intérieur de l’appartement.

Vers 0 min 25 s, le corps du plaignant, à l’exception de la partie inférieure de sa jambe et de son bras droits, se trouve à l’extérieur de la fenêtre. Du verre se brise, puis la jambe droite du plaignant sort davantage de la fenêtre. Le TC no 6 demande si les agents du SPT ont déployé leurs armes à impulsions. La jambe droite du plaignant sort à l’extérieur, et il la dégage en utilisant le mur comme levier. Le plaignant est suspendu au rebord de la fenêtre. Alors qu’il tente de s’abaisser sur le rebord d’une fenêtre sous lui, on agrippe son chandail et on le tire au-dessus de ses épaules.

Vers 0 min 55 s, le plaignant se tient sur le rebord de la fenêtre de l’appartement du dessous.

Le deuxième enregistrement commence, et l’on voit le plaignant passer du rebord de la fenêtre sur laquelle il se tenait debout à un autre rebord. Lorsqu’il atteint la deuxième fenêtre, son côté droit fait face au bâtiment. Avec son pied gauche, il donne deux coups dans la fenêtre. Il se laisse glisser un peu plus et, dos au bâtiment, il tente une nouvelle fois de briser la fenêtre avec son pied gauche. Il tourne ensuite dans le sens des aiguilles d’une montre et fait face au bâtiment. Dans les dix secondes qui suivent, le plaignant semble vouloir atteindre une fenêtre avec sa main gauche, mais il tombe du rebord, les pieds en premier. Il traverse les branches d’un arbre qui se trouvait en dessous, puis il atterrit sur le trottoir.

Le TC no 6 crie « Vous avez tous fait ça! », puis il crie à propos du fait que le plaignant a subi des déploiements d’armes à impulsions. Il accuse les agents du SPT d’avoir tué le plaignant. Le plaignant bouge lentement son corps, alors que les agents du SPT s’approchent de lui et l’encerclent. Environ 20 secondes après sa chute, les pompiers du Service des incendies de Toronto s’approchent du plaignant avec du matériel de premiers soins.

Vidéo captée à l’aide d’un téléphone cellulaire – TC no 4

La vidéo, prise depuis un immeuble résidentiel situé en face des lieux où les faits se sont déroulés, dure 37 secondes.

On voit un chandail suspendu à une fenêtre d’un étage supérieur. Le plaignant se trouve sur le record d’une fenêtre, en dessous. Ses pieds pendent sous le rebord, et il semble essayer de s’accrocher à la brique entre deux fenêtres ou au rebord de chaque fenêtre. Le plaignant tombe et heurte un arbre qui se trouvait en dessous, puis atterrit à plat ventre sur le trottoir. Neuf secondes plus tard, le plaignant se retourne sur le dos. Treize secondes plus tard, le premier pompier du Service des incendies de Toronto arrive avec du matériel de premiers soins, tandis que des agents de police se tiennent à proximité.

Enregistrements des communications du SPT

Le 17 juin 2025, vers 1 h 54, le plaignant appelle le 9-1-1. Il est agité et déclare que les agents du SPT de la 55e division ont l’intention de le tuer. Il indique qu’il y a des sacs mortuaires, du plastique et des gants dans sa résidence située dans le secteur de la rue Church et de l’Esplanade, à Toronto. Il ajoute que les agents de la 55e division l’ont accusé d’être un trafiquant de drogue et un pédophile, et il demande avec insistance au téléphoniste d’envoyer immédiatement des agents à son appartement. On entend la TC no 1 en arrière-plan de l’appel au 9-1-1, qui essaie de calmer le plaignant. Le plaignant crie que quelqu’un est à sa porte et a essayé d’entrer dans son appartement. La TC no 1 crie à la police de se dépêcher.

À 2 h 7, l’AT no 2 signale que le plaignant est exalté et frappe quelque chose à l’intérieur de l’appartement.

À 2 h 10, l’AT no 2 demande au Service des incendies de Toronto d’intervenir pour forcer la porte de l’appartement. L’agent demande également à l’équipe d’intervention d’urgence (EIU) de se rendre sur place, mais celle-ci est occupée et n’est donc pas disponible. Le plaignant crie qu’il veut que l’EIU se rende à l’appartement.

À 2 h 15, l’AT no 2 transmet par radio que le plaignant refuse d’ouvrir la porte et qu’il a pulvérisé un aérosol inconnu à l’intérieur de la porte. On demande à ce qu’un agent muni d’un fusil non létal se présente sur les lieux, ainsi qu’une personne du service de gestion de l’immeuble, afin qu’elle apporte un passe-partout pour l’appartement.

À 2 h 20, un répartiteur indique que le plaignant a appelé le 9-1-1 et a crié « Au feu, au feu, au feu ». L’AT no 2 demande qu’une équipe mobile d’intervention en situation de crise se rende sur les lieux, mais on lui répond qu’aucune équipe n’est disponible.

À 2 h 22, l’AT no 2 transmet par radio que les agents entendent quelqu’un pousser des meubles lourds devant la porte de l’appartement.

À 2 h 26, l’AT no 7 est sur place avec un pompier du Service des incendies de Toronto, qui a un pied-de-biche.

À 2 h 31, l’AT no 3 transmet par radio que le plaignant se trouve sur le rebord du balcon et qu’il sautera si les agents de police s’approchent. Environ une minute plus tard, le plaignant descend du rebord, se tient debout sur le balcon et crie.

À 2 h 34, une unité tactique du Service de police régional de Durham (SPRD) est en route vers les lieux de l’incident.

À 2 h 35, le Service des incendies de Toronto demande qu’un camion échelle se rende sur place. Un agent de police transmet par radio que le plaignant se tient sur le rebord du balcon et qu’il a passé une jambe par-dessus le rebord.

À 2 h 36, un répartiteur transmet par radio qu’une EIU du SPT est en route, et non du SPRD. Le plaignant se déplace d’avant en arrière, le dos appuyé contre le mur du balcon.

À 2 h 44, un agent de police signale que le plaignant a donné un coup de pied dans la fenêtre de son balcon et l’a brisée. Ce dernier a ensuite jeté du verre depuis le balcon et a commencé à se taillader les poignets.

À 2 h 47, on dit que le plaignant est suspendu au balcon.

À 2 h 51, le plaignant tombe au sol.

À 3 h 11, le plaignant est en route pour l’Hôpital St. Michael.

À 3 h 52 min, l’AT no 5 fait savoir par radio que le décès du plaignant a été constaté à 3 h 28.

Documents obtenus du service de police

Sur demande, l’UES a reçu les documents suivants du SPT entre le 18 juin 2025 et le 25 août 2025 :

  • enregistrements des caméras d’intervention;
  • enregistrements des communications;
  • rapport du système de répartition assistée par ordinateur;
  • politiques – personnes en situation de crise, intervention en cas d’incident (recours à la force et désescalade), armes à impulsions;
  • liste des agents concernés;
  • notes de l’AT no 7, de l’AT no 2, de l’AT no 1, de l’AT no 3, de l’AT no 4, de l’AT no 5 et de l’AT no 6;
  • antécédents du plaignant;
  • rapport d’incident général concernant une mort subite;
  • données sur le déploiement des armes à impulsions.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les éléments suivants auprès d’autres sources entre le 17 juin 2025 et le 15 juillet 2025 :

  • rapport d’appel d’ambulance des services médicaux d’urgence de Toronto;
  • vidéo captée à l’aide d’un téléphone cellulaire – TC no 2;
  • vidéo captée à l’aide d’un téléphone cellulaire – TC no 6;
  • vidéo captée à l’aide d’un téléphone cellulaire – Utilisateur anonyme de TikTok;
  • vidéo captée à l’aide d’un téléphone cellulaire – TC no 4;
  • rapport d’incident lié à une urgence du Service des incendies de Toronto.

Description de l’incident

Les éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment les entrevues menées auprès de témoins civils et de la police ainsi que les enregistrements vidéo qui montrent la majeure partie de l’incident, permettent d’établir le scénario suivant. Comme la loi les y autorise, les agents impliqués ont choisi de ne pas participer à une entrevue avec l’UES et de refuser que l’on communique leurs notes concernant l’incident.

Tôt dans la matinée du 17 juin 2025, le plaignant a communiqué avec la police pour signaler que des agents de la 55e division avaient l’intention de le tuer et qu’il y avait des sacs mortuaires, du plastique et des gants dans sa résidence. En arrière-plan de l’appel, on entendait la TC no 1, qui essayait de calmer le plaignant. Des agents de police ont été dépêchés sur les lieux pour vérifier l’état de santé du plaignant et pour évaluer la situation.

Le plaignant n’était pas sain d’esprit au moment des événements. Il séjournait depuis quelques jours chez la TC no 1, dans son appartement situé dans le secteur de la rue Church et de l’Esplanade, lorsque son état a commencé à se détériorer dans la soirée du 16 juin 2025. Il est devenu paranoïaque et très agité, et a commencé à jeter des objets par la fenêtre.

Peu après 2 h, l’AI no 1 et l’AI no 2, ainsi que d’autres agents du SPT, dont l’AT no 1 et l’AT no 2, sont arrivés devant la porte de l’appartement. Ils pouvaient entendre le plaignant crier et frapper des objets à l’intérieur de l’appartement. L’AT no 2 a pris l’initiative de tenter de désamorcer le comportement du plaignant, en lui disant, à travers la porte verrouillée, que la police était là pour l’aider. L’AI no 1 a essayé en vain d’ouvrir la porte à coups de pied. L’AT no 2 a demandé un passe-partout au personnel de la sécurité de l’immeuble ainsi que l’intervention de l’EIU. L’EIU n’était pas disponible pour intervenir. L’équipe mobile d’intervention en situation de crise du SPT n’était pas disponible non plus. Un pompier est arrivé sur les lieux avec un outil pour forcer la porte. L’AT no 2 lui a demandé d’arrêter ce qu’il faisait, de peur de provoquer le plaignant, car des agents situés dans la rue lui avaient dit que le plaignant se trouvait sur une margelle, et que l’une de ses jambes pendait du rebord. Au lieu de cela, de l’extérieur de la porte, il a demandé à la TC no 1 de parler au plaignant pour le convaincre de retourner à l’intérieur. La TC no 1 l’a fait, mais elle n’est pas parvenue à convaincre le plaignant à se mettre en sécurité.

Vers 2 h 37, la TC no 1 a ouvert la porte d’entrée, et les agents sont entrés dans l’appartement. Ils ont discuté entre eux pendant un certain temps, pesant le pour et le contre de leurs options, y compris l’utilisation d’une arme à impulsions. La TC no 1 les a également informés que le plaignant aller sauter s’ils s’approchaient de lui.

Vers 2 h 45, après avoir appris des agents situés dans la rue que le plaignant s’était coupé les poignets avec du verre brisé, l’AT no 2, l’AI no 1, l’AI no 2 et l’AT no 1 sont entrés dans la chambre et ont fait face au plaignant, qui était assis sur une petite margelle, à l’extérieur de la fenêtre. L’AI no 1 et l’AT no 1 ont déposé les armes à impulsions qu’ils tenaient sur le rebord de la fenêtre et ont passé les bras à travers la vitre brisée pour agripper le plaignant. Le plaignant a résisté vigoureusement pour se défaire de leur prise. L’AI no 2 est intervenu, en agrippant également le plaignant. L’AI no 1 a récupéré l’arme à impulsions de l’AT no 1 sur le rebord de la fenêtre et l’AI no 2 a ramassé l’arme à impulsions de l’AI no 1, puis les deux agents ont tiré sur le plaignant avec ces armes. Le plaignant a crié, mais a continué à résister. Il s’est libéré de la prise des agents et a grimpé sur le rebord de la margelle, puis il s’est abaissé sur le rebord de la fenêtre d’un appartement situé en dessous, tandis qu’on déployait de nouveau une arme à impulsions, dont la décharge a duré environ cinq secondes. Le plaignant a tenté d’ouvrir la fenêtre d’un coup de pied, avant de perdre sa prise sur le mur extérieur du bâtiment et de tomber au sol.

Les premiers intervenants sur place ont fourni des soins au plaignant. Ce dernier a été menotté, puis transporté à l’hôpital, où l’on a constaté son décès.

Cause du décès

À la lumière de l’autopsie, le médecin légiste a établi une constatation préliminaire, à savoir que le décès du plaignant était attribuable à un traumatisme contondant à la poitrine.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1), Code criminel – Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

a) soit à titre de particulier;

b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public;

c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public;

d) soit en raison de ses fonctions,

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant est décédé le 17 juin 2025 des suites d’une chute de hauteur. Comme des agents du SPT sont intervenus physiquement auprès du plaignant dans les instants qui ont précédé sa chute, l’UES a été avisée de l’incident et a ouvert une enquête. L’AI no 1 et l’AI no 2 ont été désignés comme agents impliqués. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué les éléments de preuve fournis, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’un ou l’autre de ces agents a commis une infraction criminelle relativement au décès du plaignant.

Aux termes du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle pour l’usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit, sur la base d’un jugement raisonnable, nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire.

Les agents qui ont tenté d’empêcher le plaignant de se faire du mal, y compris l’AI no 1 et l’AI no 2, exerçaient leurs fonctions légitimes tout au long de la série d’événements qui ont abouti à la chute du plaignant. Conscients de la présence d’une personne en état de crise, laquelle adoptait des comportements dangereux et se trouvait dans une position précaire, soit sur une margelle à l’extérieur d’un bâtiment, à l’étage supérieur, les agents étaient en droit, lorsqu’ils sont intervenus sur les lieux, de faire ce qu’ils pouvaient raisonnablement faire pour protéger le plaignant.

De même, je suis convaincu que la force utilisée par les agents, y compris l’AI no 1 et l’AI no 2, était raisonnable. À leur arrivée sur les lieux, les agents ont réfléchi aux options qui s’offraient à eux et ont commencé par tenter de désamorcer la situation à l’aide des lignes de communication. Pendant que ces efforts se poursuivaient, on a pris des mesures afin de rassembler d’autres ressources sur les lieux, notamment des ambulanciers, des pompiers et l’EIU. Après avoir franchi la porte d’entrée, les agents ont bien constaté que leur présence risquait d’aggraver la situation, puisque la TC no 1 les avait prévenus. Cela dit, ils agissaient sur la base de renseignements selon lesquels le plaignant s’était coupé les poignets avec du verre brisé et la situation se détériorait, notamment parce que le plaignant se trouvait sur la margelle. Dans ces circonstances, la décision des agents d’entrer dans l’appartement et dans la chambre à coucher au moment où ils l’ont fait était raisonnable. On peut en dire autant du recours à la force physique par les agents et des déploiements d’armes à impulsions. En effet, le plaignant se trouvait dans une position dangereuse, et il était impératif que les agents agissent rapidement pour le ramener dans l’appartement. En outre, puisque le plaignant avait réussi à résister aux efforts des agents pour le maîtriser, il était logique d’utiliser des armes à impulsions. Par ailleurs, le plaignant était assis ou allongé dans la margelle pendant toute la période où l’on a déployé des armes à impulsions, sauf lors du dernier déploiement, et le risque qu’il tombe par-dessus le rebord de la margelle en raison d’une incapacité neuromusculaire était minime[5]. D’ailleurs, ni le fait d’agripper le plaignant ni les déploiements d’armes à impulsions ont entraîné la chute du plaignant. Cela s’est produit après qu’il se fut libéré des agents et qu’il se fut abaissé sur le rebord d’une fenêtre située en dessous.

Pour les raisons qui précèdent, j’estime qu’il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.

Date : 14 octobre 2025

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino

Directeur

Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Sauf en cas d’indication contraire, les renseignements contenus dans cette section correspondent à ceux reçus par l’UES au moment où elle a été notifiée et ne correspondent pas nécessairement aux conclusions de l’UES à l’issue de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les éléments de preuve sous forme de vidéo ont permis de confirmer par la suite que c’est de là que le plaignant était tombé. [Retour au texte]
  • 3) Les heures sont tirées de l’horloge interne de chaque arme; ces horloges ne sont pas nécessairement synchronisées l’une avec l’autre ou avec l’heure réelle. [Retour au texte]
  • 4) Les enregistrements en question contiennent des renseignements personnels de nature délicate et ne sont donc pas divulgués, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces enregistrements sont résumées ci‑dessous. [Retour au texte]
  • 5) Selon les vidéos et les données sur le déploiement de l’arme à impulsions, l’arme à impulsions de l’AI no 1 a été déployée par l’AI no 2 pendant environ cinq secondes, alors que le plaignant était penché au‑dessus du rebord de la margelle, juste avant qu’il ne s’abaisse sur le rebord d’une fenêtre située en dessous. Les éléments de preuve donnent à penser qu’il s’agissait d’un déploiement involontaire causé par le fait que l’AI no 2 s’est penché sur l’arme, située sur le rebord de la fenêtre de la chambre, alors que l’AI no 1 et lui tendaient les bras à travers la fenêtre pour tenter de maintenir leur prise sur le plaignant. Il ne semble pas non plus que ce déploiement ait été la cause immédiate de la chute du plaignant. En effet, celui‑ci a montré qu’il contrôlait ses facultés physiques après la fin de la décharge électrique, alors qu’il s’est abaissé sur le rebord d’une fenêtre et qu’il a donné des coups de pied sur une fenêtre. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.