Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 25-OCI-301

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • des renseignements qui révèlent des
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
  • des renseignements sur le lieu de l’incident;
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant la blessure grave subie par une femme de 34 ans (la « plaignante »).

L’enquête

Notification de l’UES[1]

Le 31 juillet 2025, à 20 h 3, le Service de police de Chatham-Kent (SPCK) a communiqué avec l’UES pour lui transmettre l’information suivante.

Le 31 juillet 2025, à 11 h 40, on a mis la plaignante en état d’arrestation, car elle avait omis de respecter les conditions d’une ordonnance de mise en liberté. On l’a emmenée au commissariat de police et on l’a fouillée, puis on l’a transportée au palais de justice, où on l’a placée sous garde. À 16 h 35, les agents qui s’étaient rendus à l’aire des cellules du palais de justice pour transporter la plaignante au centre de détention ont constaté qu’elle était inconsciente. Les agents ont administré deux doses de Narcan (naloxone) et on a demandé la présence des services médicaux d’urgence. On a transporté la plaignante à l’hôpital Alliance Chatham-Kent pour la santé. Lors de son passage au service de triage, elle a admis avoir consommé du fentanyl. La plaignante a été admise à l’hôpital pour observation et placée sous perfusion intraveineuse de Narcan. Elle était consciente au moment du signalement de l’incident.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 1er août 2025, à 10 h 35

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 1er août 2025, à 15 h 42

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0

Personne concernée (« plaignante ») :

Femme de 34 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.

La plaignante a participé à une entrevue le 1er août 2025.

Agent impliqué (AI)

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 3 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 4 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 5 N’a pas participé à une entrevue; notes examinées; entrevue jugée non nécessaire

AT no 6 N’a pas participé à une entrevue; notes examinées; entrevue jugée non nécessaire

Les agents témoins ont participé à des entrevues le 21 août 2025.

Éléments de preuve

Les lieux

Les événements en question se sont déroulés dans l’aire de mise en détention du commissariat du SPCK, au 24, 3e rue, à Chatham, ainsi que dans une cellule du palais de justice de Chatham, au 425, avenue Grand Ouest, à Chatham, et aux alentours de celle-ci.

Éléments de preuve matériels

On a trouvé une fiole noire sur le dessus du matelas dans une cellule du palais de justice de Chatham. Elle mesurait environ 6 cm de long et était munie d’un couvercle fileté.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[2]

Enregistrements des communications de la police

Le 31 juillet 2025, à 11 h 40 min 12 s, l’AT no 1 communique avec le répartiteur pour qu’on lui confirme qu’il y a des motifs raisonnables et probables de mettre la plaignante en état d’arrestation. À 11 h 42 min 48 s, l’AI donne cette confirmation.

À 16 h 44, l’AT no 6 demande qu’on envoie les services médicaux d’urgence – une personne en détention au palais de justice [on sait maintenant qu’il s’agissait de la plaignante plaignant], même si elle respire normalement, est de moins en moins consciente.

Images captées par la caméra à bord du véhicule de police – Véhicule de l’AT no 1

Sur les images captées par la caméra à bord du véhicule de l’AT no 1, on voit la plaignante sur le siège arrière de ce véhicule de 11 h 47 min 48 s jusqu’à 11 h 52 min 44 s, le 31 juillet 2025.

À 11 h 47 min 58 s environ, la plaignante est assise sur le siège arrière, du côté passager, du véhicule de police de l’AT no 1, menottée avec les mains dans le dos et assise en position verticale.

Vers 11 h 48 min 42 s, l’AT no 1 indique à la plaignante la raison de son arrestation, puis l’informe de ses droits constitutionnels et lui transmet une mise en garde. La plaignante dit avoir compris et donne à l’AT no 1 le nom de son avocat.

À 11 h 50 min 30 s environ, la plaignante fouille dans la poche avant droite de son pantalon, avec sa main droite, alors que le véhicule de police est en mouvement. On ne peut voir clairement si elle en retire quelque chose, car elle garde sa main sur ses genoux. Ensuite, elle se penche vers l’avant et ses cheveux obstruent le champ de la caméra.

Vers 11 h 50 min 47 s, la plaignante met une fiole noire dans le devant de son pantalon.

À 11 h 50 min 56 s environ, la plaignante fouille dans le devant de son pantalon, derrière sa ceinture; elle garde sa main à cet endroit pendant dix secondes.

À 11 h 51 min 6 s environ, la plaignante retire sa main de son pantalon, alors qu’elle est assise en position verticale, la tête baissée.

Vers 11 h 52 min 44 s, l’AT no 1 ouvre la portière du côté passager et la plaignant descend du véhicule, sans aide. Ils se trouvent alors à l’entrée des véhicules du commissariat duSPCK.

La caméra à bord du véhicule de police n’a rien capté qui aurait pu avoir une valeur probante lorsqu’on a transporté la plaignante depuis le commissariat duSPCK jusqu’au palais de justice de Chatham.

Enregistrements vidéo de l’aire de mise en détention – Service de police

Le 31 juillet 2025, vers 11 h 53 min 8 s, l’AT no 1 escorte la plaignante dans l’aire de mise en détention, où celle-ci s’assoit sur un banc. Elle marmonne à voix basse, mais elle est consciente et coopérative.

À 11 h 55 min 38 s environ, l’AI demande à la plaignante si elle a consommé des drogues illicites le jour même. La plaignante admet avoir consommé du fentanyl et de la marijuana, et dit se sentir bien; elle ne précise pas la quantité de drogue qu’elle a consommée. Elle indique qu’elle n’a pas besoin de soins médicaux ni de médicaments et qu’elle n’est pas suicidaire.

À 11 h 56 min 46 s environ, l’AT no 2 fouille les poches du pantalon de la plaignante et en retire plusieurs petits objets. L’AT no 2 passe rapidement son doigt entre la ceinture et le pantalon de la plaignante. Elle retire les menottes à la plaignante, puis fouille par palpation les jambes et le revers de son pantalon. L’AT no 2 passe brièvement le dos de sa main entre les seins de la plaignante, au bas de ceux-ci, puis entre les omoplates de la plaignante. La plaignante enlève ses bracelets, son collier et sa ceinture. Elle retire aussi ses bottes et ses chaussettes, puis montre le dessous de ses pieds.

À 12 h 3 min 6 s environ, l’AI fournit à la plaignante une combinaison à porter, puis l’AT no 1 lui donne une barre de céréales alors qu’elle est toujours assise sur le banc.

Vers 12 h 14 min 2 s, l’AI et l’AT no 1 escortent la plaignante hors de l’aire de mise en détention.

À 12 h 19 min 35 s environ, l’AT no 1 ramène la plaignante à l’aire de mise en détention. Elle enfile ses bottes, est menottée, les mains dans le dos, et est escortée hors de l’aire de mise en détention.

Enregistrements vidéo de l’aire de mise en détention et des cellules – Palais de justice

Le 31 juillet 2025, à 12 h 30 min environ, on amène la plaignante au palais de justice de Chatham.

À 12 h 31 min environ, on range les effets personnels de la plaignante dans un casier.

Vers 12 h 33 min, on place la plaignante dans une cellule. Elle pose le matelas sur le sol, s’allonge dessus et mange de la nourriture à même un sac en papier.

Vers 15 h 37, un agent spécial réveille la plaignante, la menotte, les mains devant son corps, et l’amène hors du champ de la caméra.

À 15 h 40 min environ, l’agent spécial ramène la plaignante à sa cellule, lui retire les menottes et la place à l’intérieur de la cellule.

À 15 h 41 min environ, la plaignante se met debout sur le matelas, descend la fermeture à glissière de sa combinaison et porte la main à son entrejambe. Ensuite, elle s’assoit sur le matelas, les jambes croisées et les mains jointes sur les genoux. La plaignante manipule quelque chose dans sa main et enlève un bouchon.

À 15 h 42 environ, on voit la plaignante qui tient une fiole noire dans sa main droite et qui verse quelque chose dans sa main gauche. Ensuite, elle revisse le couvercle de la fiole, tenant celle-ci dans sa main droite.

À 15 h 43 environ, la plaignante serre le flacon dans sa main droite, tout en faisant rouler avec ses doigts la substance qu’elle a versée dans sa main. Elle s’assoit ensuite sur le sol. On lui donne une boisson et deux barres de céréales. Immédiatement, elle boit le jus et met dans sa bouche la substance qui se trouvait dans sa main gauche. Ensuite, elle lèche sa main gauche, boit un peu plus de jus, mange une barre de céréales et s’allonge.

À 15 h 50 environ, la plaignante s’assoit, retire le bouchon de la fiole et consomme un peu plus de la substance qui s’y trouve. Puis, elle s’allonge de nouveau, la fiole toujours dans sa main gauche.

Vers 15 h 53, la plaignante se redresse, consomme une fois de plus une quantité de la substance contenue dans le flacon, avant de s’allonger de nouveau.

À 16 h 12 environ, on fait une vérification dans l’aire des cellules, auprès de la plaignante. Elle semble dormir.

Vers 16 h 31, un agent spécial entre dans la cellule de la plaignante. Il secoue le matelas, mais la plaignante ne réagit pas.

À 16 h 32 environ, l’agent spécial secoue la plaignante pour tenter de la réveiller.

À 16 h 33 environ, l’AT no 6 tente à deux reprises de voir à ce que la plaignante se lève. Il administre à la plaignante une dose de naloxone par voie nasale, pendant que celle-ci est placée sur le dos, sur le matelas.

À 16 h 38 environ, les efforts déployés pour réveiller la plaignante sont infructueux et on lui administre une deuxième dose de naloxone par voie nasale. La plaignante respire. On la place dans la position latérale de sécurité.

Vers 16 h 44, des ambulanciers paramédicaux arrivent sur les lieux.

À 16 h 50 environ, on sort la plaignante de la cellule et on la place sur une civière. La plaignante est consciente et s’entretient avec un ambulancier paramédical.

À 16 h 56 environ, la plaignante quitte le palais de justice à bord de l’ambulance.

Documents obtenus du service de police

Sur demande, l’UES a obtenu les éléments suivants de la part du SPCK entre le 6 août 2025 et le 27 novembre 2025 :

  • images captées par la caméra à bord du véhicule de police;
  • enregistrements vidéo de l’aire de mise en détention;
  • enregistrements des communications;
  • photos;
  • rapports d’incident général;
  • rapports supplémentaires;
  • rapports du système de répartition assistée par ordinateur;
  • rapport d’arrestation;
  • liste des agents concernés;
  • politiques du SPCK – fouille de personnes; escorte et transport des personnes détenues; garde et contrôle des personnes détenues;
  • notes – AT no 1, AT no 5, AT no 6, AT no 2, AT no 3 et AT no 4;
  • registre de la détention;
  • sommaire du dossier de la Couronne – non-respect d’une ordonnance de mise en liberté

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les dossiers médicaux de la plaignante de l’hôpital Alliance Chatham-Kent pour la santé le 12 août 2025.

Description de l’incident

Les éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment les entrevues menées avec la plaignante et les témoins de la police, ainsi que les enregistrements vidéo qui montrent la majeure partie de l’incident, permettent d’établir le scénario suivant. Comme la loi l’y autorise, l’AI a choisi de ne pas participer à une entrevue avec l’UES et de refuser qu’on communique ses notes.

Dans la matinée du 31 juillet 2025, l’AT no 1, en patrouille dans le centre-ville de Chatham, a arrêté la plaignante parce que celle-ci n’avait pas respecté les conditions d’une ordonnance de remise en liberté. L’arrestation s’est déroulée sans incident. Étant donné qu’aucune agente n’était disponible pour fouiller la plaignante, l’agent a brièvement fouillé l’avant des jambes de celle-ci et a procédé à une inspection visuelle, avant de lui faire prendre place le siège arrière de son véhicule de police pour l’emmener au commissariat.

Au commissariat de police, une agente, l’AT no 2, a fait une fouille plus exhaustive de la plaignante. L’AT no 2 a vérifié les poches des vêtements de la plaignante et l’a fouillée par?dessus ceux-ci. Elle a trouvé plusieurs petits objets, mais rien qui ne soit de l’ordre des substances illicites. Lorsque l’AI lui a demandé si elle avait consommé des drogues, la plaignante a admis avoir consommé du fentanyl et de la marijuana. Elle a dit qu’elle se sentait bien et a nié avoir des idées suicidaires. Peu après son enregistrement au commissariat, la plaignante a été placée dans la voiture de police de l’AT no 1, puis transportée au palais de justice en vue d’une audience sur la libération sous caution.

Au palais de justice, une agente spéciale a fouillé la plaignante une nouvelle fois, puis l’a placée dans une cellule en attendant sa comparution devant le tribunal. Après sa comparution, on a ramené la plaignante dans sa cellule, vers 15 h 40. Elle a récupéré une fiole dans ses sous-vêtements, près de l’aine, l’a ouverte, a versé une substance dans sa main et l’a consommée. Quelques minutes plus tard, la fiole toujours dans sa main, la plaignante a consommé une plus grande quantité de la substance.

Vers 16 h 30, l’agent spécial chargé de faire des vérifications auprès des personnes détenues est entré dans la cellule de la plaignante et a tenté de la réveiller. La plaignante respirait, mais il était impossible de la réveiller. L’agent lui a administré deux doses de naloxone par voie nasale.

Des ambulanciers paramédicaux sont arrivés dans l’aire des cellules du palais de justice et ont entrepris de s’occuper de la plaignante. Elle était consciente à ce moment-là.

On a emmené la plaignante à l’hôpital, où on l’a traitée pour une surdose de drogue. On a détecté la présence de plusieurs substances illicites dans son organisme, notamment du fentanyl, de la cocaïne et de la méthamphétamine.

Dispositions législatives pertinentes

Articles 219 et 221, Code criminel – Négligence criminelle causant des lésions corporelles

219 (1) Est coupable de négligence criminelle quiconque :

a) soit en faisant quelque chose;

b) soit en omettant de faire quelque chose qu’il est de son devoir d’accomplir,

montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.

(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

221 Quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui est coupable :
a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans;
b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure
sommaire.

Analyse et décision du directeur

La plaignante est devenue malade alors qu’elle était sous la garde du SPCK le 31 juillet 2025, à la suite d’une surdose de drogue. L’UES a été avisée de l’incident et a entrepris une enquête, désignant l’AI à titre d’agent impliqué. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir examiné les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle relativement à l’incident en question.

L’infraction possible à l’étude est la négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles, aux termes de l’article 221 du Code criminel. Cette infraction est réservée aux cas de négligence graves qui montrent une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui. Cette infraction est fondée en partie sur une conduite qui constitue un écart marqué et important par rapport au niveau de diligence qu’une personne raisonnable aurait exercé dans des circonstances similaires. Dans l’affaire qui nous concerne, la question est de savoir s’il y a eu, de la part des agents de police qui se sont chargés de la garde de la plaignante, dont l’AI, un manque de diligence qui aurait causé l’état médical de la plaignante, ou qui y aurait contribué, et, le cas échéant, s’il est suffisamment grave pour justifier des sanctions criminelles. À mon avis, ce n’est pas le cas.

La plaignante a été légalement sous la garde de la police à partir de son arrestation jusqu’à sa surdose, dans l’aire des cellules du palais de justice. Disposant de renseignements selon lesquels la plaignante ne s’était pas présentée au service de police, en violation d’une ordonnance de mise en liberté, l’AT no 1 était en droit d’agir et de la mettre en état d’arrestation.

De même, je suis convaincu que les agents de police qui se sont chargés de la garde de la plaignante, y compris ceux qui étaient sous la supervision de l’AI au commissariat de police, se sont comportés avec la diligence requise, en accordant toute l’attention nécessaire à la santé et au bien-être de la plaignante. La question qu’il convient d’examiner est celle de savoir comment la plaignante a pu ingérer une substance illicite pendant qu’elle était sous la garde de la police. D’abord, en ce qui concerne les fouilles, il y en a eu trois, dont deux fouilles par palpation effectuées par des agentes. Puisque la plaignante avait caché une petite fiole contenant la drogue en question dans ses sous-vêtements, il n’est pas si surprenant que la drogue n’ait pas été découverte ou confisquée, d’autant plus que la plaignante portait un pantalon ample. Une fouille à nu aurait pu permettre de trouver la drogue, mais il n’est pas certain qu’il y avait des motifs légitimes de procéder à une telle fouille voir l’affaire R. c. Golden, [2001] 3 RCS 679. En effet, la plaignante n’avait pas été arrêtée pour des raisons liées à la drogue, a nié avoir des idées suicidaires et ne semblait pas être sous l’effet de drogues. Quant à la question de savoir si on l’a surveillée comme il se devait pendant qu’elle se trouvait dans l’aire des cellules du palais de justice, il aurait fallu une surveillance continue, rien de moins, pour empêcher la plaignante d’accéder à la drogue et de l’ingérer. Toutefois, si une fouille à nu n’était probablement pas légitime, il n’était pas non plus évident qu’une surveillance continue était requise. Il convient de noter que les membres du personnel de l’aire des cellules ont agi rapidement après la dernière ingestion de drogue par la plaignante pour lui administrer les premiers soins d’urgence et voir à ce qu’elle reçoive une assistance médicale.

Pour les raisons qui précèdent, j’estime qu’il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.

Date : 28 novembre 2025

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino

Directeur

Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Sauf en cas d’indication contraire, les renseignements contenus dans cette section correspondent à ceux reçus par l’UES au moment où elle a été notifiée et ne correspondent pas nécessairement aux conclusions de l’UES à l’issue de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les enregistrements en question contiennent des renseignements personnels de nature délicate et ne sont donc pas divulgués, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces enregistrements sont résumées ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.