Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 19-OCI-171
Attention :
Cette page affiche un contenu graphique pouvant choquer, offenser et déranger.
Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.
En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.
En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)
En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :- de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
- de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.
En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- le nom de tout agent impliqué;
- le nom de tout agent témoin;
- le nom de tout témoin civil;
- les renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)
En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables.Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.Exercice du mandat
La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).
On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.
Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par une femme de 18 ans (plaignante).
On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.
Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par une femme de 18 ans (plaignante).
L’enquête
Notification de l’UES
Le 24 juillet 2019, à 8 h 50, le Service de police régional de Peel a avisé l’UES de la blessure de la plaignante. Le Service de police régional de Peel a en effet rapporté que, le 23 juillet 2019, à 23 h 30, des agents avaient poursuivi brièvement un véhicule dont les occupants étaient recherchés pour des vols et des introductions avec effraction. La poursuite a été interrompue et le véhicule a par la suite été retrouvé après avoir fait une collision. L’agent impliqué (AI), un agent de l’escouade canine, a suivi une personne faisant partie des occupants et l’a rattrapée dans la cour arrière d’une résidence de Fortune Place, à Mississauga. Lorsqu’elle a été retrouvée, la plaignante a été mordue au bras par le chien policier. Elle avait donc une grosse morsure dans le haut du triceps droit qui nécessitait une chirurgie. Elle a été transportée à l’Hôpital Credit Valley, où elle se trouvait toujours au moment de la notification. Les lieux ont été examinés par le Service de police régional de Peel et libérés.
L’équipe
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3 Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1
Trois enquêteurs de l’UES et un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires ont été affectés. L’enquêteur spécialiste a photographié les lieux et a pris des mesures.
Les enquêteurs de l’UES ont ratissé le secteur à la recherche de témoins.
Le plaignant a été interrogé et il a consenti à donner à l’UES l’accès à ses dossiers médicaux.
Un homme a été identifié comme témoin potentiel puisqu’il se trouvait avec la plaignante au moment de son arrestation. Les enquêteurs de l’UES l’ont retrouvé, mais il a refusé d’être interrogé par eux.
L’AI a été désigné comme agent impliqué le 29 juillet 2019. Suivant les conseils de son avocat, il a choisi de garder le silence et il n’a pas consenti à remettre ses notes à l’UES.
Plaignante :
Femme de 18 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinésTémoin civil
TC A participé à une entrevue Agents témoins
AT no 1 A participé à une entrevueAT no 2 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées
AT no 3 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées
AT no 4 A participé à une entrevue
Agent impliqué
AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.Éléments de preuve
Les lieux
La résidence de Fortune Place, à Mississauga, est une maison seule en brique dans un lotissement résidentiel. La cour arrière est délimitée par une clôture en bois avec une porte en bois du côté ouest de la résidence. Une barrière en bois se trouvant du côté est de la résidence est reliée à la clôture en bois le long du côté est du périmètre. La barrière ainsi que la clôture sont d’une hauteur de 1,89 m (6 pi 2½ po). Entre la maison et la clôture se trouve un petit espace, de 2,82 m (9 pi 3 po) de long sur 0,62 m (2 pi 1 po) de large, du côté est de la maison. Le sol à cet endroit était couvert de pavé en pierre et de débris.
Enregistrements de communications
Les enregistrements de communications des événements survenus le 23 juillet 2019, qui ont occasionné la blessure de la plaignante, concordent avec les rapports écrits du système de répartition assisté par ordinateur. De plus, les communications par radio concordent aussi avec les déclarations des agents témoins et avec les documents à l’appui fournis par le Service de police régional de Peel.Éléments obtenus auprès du Service de police
Sur demande, l’UES a obtenu et examiné les documents et éléments suivants du Service de police régional de Peel :- des certificats de formation de l’AI;
- le registre de formation de l’AI sur l’agilité;
- le registre de formation de l’AI sur les explosifs;
- le registre de formation de l’AI sur les appréhensions;
- le registre de formation de l’AI sur l’obéissance;
- le registre de formation de l’AI sur les fouilles;
- le registre de formation de l’AI sur le pistage;
- le rapport des communications – appels téléphoniques;
- le rapport des communications – transmissions par radio;
- l’historique des morsures par le chien policier de l’AI;
- le registre de divulgation du 6 août 2019;
- la chronologie des événements (x4);
- les notes des AT nos 1, 2 et 3;
- le rapport des détails de l’incident;
- les renseignements détaillés sur le plaignant;
- les photographies des lieux;
- la procédure relative à l’escouade canine;
- la procédure relative aux interventions en cas d’incident;
- les lettres de demande de l’UES avec des inscriptions du Service de police régional de Peel (x2).
Description de l’incident
Le 24 juillet 2019, à environ 23 h 30, le Service de police régional de Peel s’est engagé dans la poursuite en voiture d’une camionnette blanche qui avait été signalée pour des infractions d’entrée par effraction et de vol. Voyant que le conducteur de la camionnette ne s’arrêtait pas et conduisait de manière dangereuse, le policier a mis un terme à la poursuite pour préserver la sécurité du public. Un peu plus tard, la même camionnette a été retrouvée après une collision d’un seul véhicule automobile. Deux des occupants ont été retrouvés debout sur le bord de la route et ont été arrêtés. Puisque les quatre portières du véhicule étaient ouvertes, les agents ont supposé que d’autres occupants étaient dans le véhicule au moment de la collision et avaient pris la fuite.
L’AI (un agent de l’escouade canine) et son chien policier ont été dépêchés sur les lieux pour qu’ils tentent de retrouver les personnes manquantes. La plaignante et une autre personne, qui avaient fui de la camionnette blanche, ont été retrouvées par le chien policier. Elles étaient dissimulées dans un espace restreint d’environ 2,8 mètres de long dans la cour arrière d’une résidence de Fortune Place à Mississauga. L’espace en question était entre la maison et une clôture d’environ 1,9 mètre de haut. Le chien policier, qui avait senti l’odeur des fuyards, a pénétré dans cet espace et a attrapé (mordu) la partie du corps la plus près, soit le haut de la cuisse droite de la plaignante. Celle-ci a alors été arrêtée en quelques instants. Elle a été conduite à l’hôpital, où elle a été traitée pour une morsure de chien.
L’AI (un agent de l’escouade canine) et son chien policier ont été dépêchés sur les lieux pour qu’ils tentent de retrouver les personnes manquantes. La plaignante et une autre personne, qui avaient fui de la camionnette blanche, ont été retrouvées par le chien policier. Elles étaient dissimulées dans un espace restreint d’environ 2,8 mètres de long dans la cour arrière d’une résidence de Fortune Place à Mississauga. L’espace en question était entre la maison et une clôture d’environ 1,9 mètre de haut. Le chien policier, qui avait senti l’odeur des fuyards, a pénétré dans cet espace et a attrapé (mordu) la partie du corps la plus près, soit le haut de la cuisse droite de la plaignante. Celle-ci a alors été arrêtée en quelques instants. Elle a été conduite à l’hôpital, où elle a été traitée pour une morsure de chien.
Dispositions législatives pertinentes
Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées
25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :a) soit à titre de particulierest, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
Les articles 219 et 221 du Code criminel -- Négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles
219 (1) est coupable d’une négligence criminelle quiconque :a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qui est de son devoir d’accomplir, montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.
221 Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui.
Analyse et décision du directeur
Pour évaluer la responsabilité criminelle potentielle de l’AI en relation avec l’arrestation et la blessure de la plaignante, j’ai pris en considération l’entrevue avec les témoins faite par les enquêteurs de l’UES, la déclaration d’un expert de l’entraînement des chiens policiers et les photos ainsi que les mesures du lieu où la plaignante était dissimulée.
En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents ne peuvent être tenus responsables sur le plan criminel d’avoir employé la force dans l’exécution de leurs fonctions, à condition que l’usage de la force ait été raisonnablement nécessaire pour des actes qu’ils étaient obligés ou autorisés à poser en vertu de la loi. Je peux dire dès le départ qu’il ne fait aucun doute pour moi que l’arrestation de la plaignante était légitime. En effet, il y avait, à mon avis, des motifs raisonnables de croire qu’elle avait été une occupante de la camionnette qui venait d’être poursuivie par la police et qui se trouvait à proximité de Stonecutter Crescent.
Pour ce qui est de l’utilisation par l’AI d’un chien policier pour l’aider à arrêter la plaignante, j’ai également la conviction qu’il s’agissait d’une technique raisonnablement nécessaire dans les circonstances. Dans ce cas particulier, vu l’espace extrêmement restreint là où les deux suspects étaient dissimulés et le fait qu’ils étaient dans l’obscurité, il n’aurait pas été sécuritaire pour l’AI d’entrer sans savoir à quoi il s’exposait et si, notamment, les suspects étaient armés. Il a par conséquent décidé, avec raison, à mon avis, d’envoyer le chien policier dans l’espace en question pour empêcher les suspects de fuir et pouvoir procéder à leur arrestation. J’estime que c’était là une décision empreinte de prudence dans les circonstances.
La question d’une éventuelle responsabilité de négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles, prévue par l’article 221 du Code criminel, se pose d’après des éléments de preuve réunis durant l’enquête. Selon les éléments de preuve en question, il semblerait qu’une fois que la plaignante a levé les bras et s’est réellement rendue, le chien policier l’ait mordue une fois de plus sans raison apparente (ce qui est contraire à l’entraînement qu’il a reçu). Même si cela entre en contradiction avec ce qu’a indiqué un agent témoin, je suis prêt à supposer que cela se soit vraiment produit pour les besoins de la présente analyse. À mon avis, il n’y a, au vu du dossier, pas de motifs suffisants de croire que l’AI a fait preuve de négligence criminelle dans son utilisation du chien policier.
Pour qu’on juge qu’une infraction de négligence a été commise et que quelqu’un est responsable de négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles, il faut notamment que la personne ait eu une conduite représentant un écart marqué et important par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation. La plaignante et son compagnon ont été aperçus étendus, la tête du côté de la clôture et les jambes exposées, notamment la jambe droite de la plaignante et la jambe gauche de son compagnon. Conformément à son entraînement, le chien policier est entré dans l’espace confiné et a mordu le membre le plus près de lui. Il s’agissait de la jambe droite de la plaignante et il lui a donc mordu la cuisse droite. Si, après avoir lâché prise, le chien avait mordu la plaignante une deuxième fois lorsqu’elle s’était rendue à la police, cela serait problématique. Cependant, en l’absence d’indications portant à croire que l’AI était au courant du fait que le chien avait tendance à se comporter ainsi, je juge que son utilisation du chien dans cette affaire était conforme à la norme de diligence prescrite par le droit criminel. Au contraire, le registre d’entraînement du chien en question et ses antécédents montrent que le chien policier exerçait ses fonctions de façon satisfaisante.
Pour les raisons exposées ci-dessus, j’en conclus que les actions de l’AI n’ont pas dépassé les limites de ce que prescrit le Code criminel, et des accusations ne sont donc pas portées.
Date : 14 avril 2020
Signature électronique
Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents ne peuvent être tenus responsables sur le plan criminel d’avoir employé la force dans l’exécution de leurs fonctions, à condition que l’usage de la force ait été raisonnablement nécessaire pour des actes qu’ils étaient obligés ou autorisés à poser en vertu de la loi. Je peux dire dès le départ qu’il ne fait aucun doute pour moi que l’arrestation de la plaignante était légitime. En effet, il y avait, à mon avis, des motifs raisonnables de croire qu’elle avait été une occupante de la camionnette qui venait d’être poursuivie par la police et qui se trouvait à proximité de Stonecutter Crescent.
Pour ce qui est de l’utilisation par l’AI d’un chien policier pour l’aider à arrêter la plaignante, j’ai également la conviction qu’il s’agissait d’une technique raisonnablement nécessaire dans les circonstances. Dans ce cas particulier, vu l’espace extrêmement restreint là où les deux suspects étaient dissimulés et le fait qu’ils étaient dans l’obscurité, il n’aurait pas été sécuritaire pour l’AI d’entrer sans savoir à quoi il s’exposait et si, notamment, les suspects étaient armés. Il a par conséquent décidé, avec raison, à mon avis, d’envoyer le chien policier dans l’espace en question pour empêcher les suspects de fuir et pouvoir procéder à leur arrestation. J’estime que c’était là une décision empreinte de prudence dans les circonstances.
La question d’une éventuelle responsabilité de négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles, prévue par l’article 221 du Code criminel, se pose d’après des éléments de preuve réunis durant l’enquête. Selon les éléments de preuve en question, il semblerait qu’une fois que la plaignante a levé les bras et s’est réellement rendue, le chien policier l’ait mordue une fois de plus sans raison apparente (ce qui est contraire à l’entraînement qu’il a reçu). Même si cela entre en contradiction avec ce qu’a indiqué un agent témoin, je suis prêt à supposer que cela se soit vraiment produit pour les besoins de la présente analyse. À mon avis, il n’y a, au vu du dossier, pas de motifs suffisants de croire que l’AI a fait preuve de négligence criminelle dans son utilisation du chien policier.
Pour qu’on juge qu’une infraction de négligence a été commise et que quelqu’un est responsable de négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles, il faut notamment que la personne ait eu une conduite représentant un écart marqué et important par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation. La plaignante et son compagnon ont été aperçus étendus, la tête du côté de la clôture et les jambes exposées, notamment la jambe droite de la plaignante et la jambe gauche de son compagnon. Conformément à son entraînement, le chien policier est entré dans l’espace confiné et a mordu le membre le plus près de lui. Il s’agissait de la jambe droite de la plaignante et il lui a donc mordu la cuisse droite. Si, après avoir lâché prise, le chien avait mordu la plaignante une deuxième fois lorsqu’elle s’était rendue à la police, cela serait problématique. Cependant, en l’absence d’indications portant à croire que l’AI était au courant du fait que le chien avait tendance à se comporter ainsi, je juge que son utilisation du chien dans cette affaire était conforme à la norme de diligence prescrite par le droit criminel. Au contraire, le registre d’entraînement du chien en question et ses antécédents montrent que le chien policier exerçait ses fonctions de façon satisfaisante.
Pour les raisons exposées ci-dessus, j’en conclus que les actions de l’AI n’ont pas dépassé les limites de ce que prescrit le Code criminel, et des accusations ne sont donc pas portées.
Date : 14 avril 2020
Signature électronique
Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.